Depuis quelques temps, d’autres mesures beaucoup plus contraignantes encore se sont ajoutées à la panoplie du patron américain : en règle générale, les hôpitaux ou autres organismes, liés d’une façon ou d’une autre aux professions de la santé ont une politique anti-tabagisme radicale. Sur le formulaire d’embauche, il est explicitement spécifié que l’entreprise n’embauche pas de fumeur, Tabacco-free hiring. Les candidats retenus devront se soumettre à un test d’urine qui, le cas-échéant, révèle la présence de nicotine. Un employé suspecté de fumer parce qu’il sentirait le tabac, ou aurait des doigts jaunis est tout simplement renvoyé. Après tout, on est tenu de montrer l’exemple.
Une foule de fumeurs devant l'hôpital Je m’empresse de préciser que Nicole, mon infirmière et mon médecin sont des gens formidables et que je n’ai qu’à me féliciter de leurs services. Déjà, l’Américaine en moi se rebiffe, fronce le nez en passant devant la horde des fumeurs – quelle que soit l’heure de mes visites, la même foule est occupée à discuter, cigarette au bec - mais qui donc, pendant ce temps, s’occupe des malades ? Est-ce qu’ils/elles se lavent les mains quand ils/elles reprennent du service ? Et on dit les personnels hospitaliers débordés ? J’ai une petite pensée compatissante pour ces pauvres non-fumeurs qui eux, n’ont pas la pause cigarette 5-6 fois par jour. Et puis, je me rassure, en me disant qu’ils sont certainement à la machine à café.
Pour l’instant, on sait bien que les fumeurs coûtent très chers à la société. (J’entends déjà la critique de l’argument : d’autres groupes « à risque » aussi coûtent cher et puis, est-on vraiment responsable de tout ce qu’on ingère grâce à l’industrie agro-alimentaire). On le sait, mais on ne le sent pas. J’imagine le tollé si la sécurité sociale refusait de rembourser les dépenses de santé liées aux problèmes respiratoire chez le fumeur, chose commune ici.
La solidarité, c’est faire face, ensemble, à des impondérables. La cigarette entre difficilement dans cette catégorie. D’où une sorte d’hostilité aux USA à l’égard des fumeurs et le fait que jamais au grand jamais, un fumeur ne se permettrait de fumer à proximité d’un hôpital et encore moins d’une école - deux pâtés de maison, c’est la distance réglementaire où il est interdit de fumer.
La plupart du temps, on fume au fond de son jardin, à l’abri des regards. Un jour, à Boston, une de mes amies de longue date m’a avoué qu’elle fumait. Elle attendait que ses enfants partent à l’école pour aller se cacher au fond de son jardin, sous une tonnelle épaisse afin de n’être vue de personne. Son secret lui pesait, elle était soulagée de le partager avec quelqu’un. Elle pensait qu’une Française serait plus compréhensive, et bien sûr, à l’époque, je m’étais demandé, si elle avait bien toute sa tête. Aujourd’hui, je me demande combien de temps cela prendra pour qu’on constate les mêmes comportements en France.