1er mai à la maison, casserolades et revendications "non confinées"

Publié le 01/05/2020 - 12:00
Mis à jour le 01/05/2020 - 12:33

Un 1er mai confiné, sans manifestation ni guère de brins de muguet, mais avec une multitude d’interrogations en tête sur les conditions de déconfinement. A Besançon, quelques militants ont décidé de se réunir avec des masques pour continuer la lutte… 

Concerts de casseroles, chants collectifs, manifs en ligne et pancartes revendicatives: les syndicats, sortis déçus d'une réunion par visioconférence avec Édouard Philippe sur les modalités du déconfinement, célèbrent la journée internationale des travailleurs sur les réseaux sociaux et depuis les balcons.

A Besançon en fin de matinée, plusieurs Gilets jaunes se sont donnés rendez-vous en haut de la rue de Belfort dans le quartier palente avec quelques slogans

Un 1er-Mai sans manifestation, mais plein d'interrogations

Le 1er mai 2019, la CFDT Besançon et l'UNSA étaient rassemblés pour lancer le pacte du pouvoir de vivre avec 66 propositions pour redéfinir un projet de sociétéé? à la sortie de crise des gilets jaunes.

Pour le premier mai 2020, la CFDT et la CFDT retraités du Doubs appellent à rester confinés.  "Pourtant les motifs pour manifester dans la rue ne manquent pas mais la situation sanitaire nous impose ce confinement. La pandémie semble faire redécouvrir à certains l'importance de secteurs d'activités sans lesquels il n'est pas possible de vivre ensemble, voire de vivre « tout court ». Ce n'est pas le cas pour notre organisation qui, avec d'autres et depuis longtemps, a revendiqué des personnels supplémentaires pour les EPHAD et pour le soutien à domicile et de façon plus générale pour les services de santé. Des personnels mieux formés, mieux rémunérés !"

"Ni le COVID 19, ni le gouvernement, ni le Medef  ne feront taire nos revendications ! " FO 25

Pour ce 1er mai 2020, Force Ouvrière a réalisé une affiche rouge à l’occasion de ce premier mai qui insiste sur la santé au travail qui doit être considérée comme un droit fondamental partout dans le monde. "Il est vrai que ce 1er mai raisonne d’une façon particulière car si nous sommes confinés, nos revendications ne doivent pas l’être…" 

Force ouvrière voit aussi un parallèle entre la crise liée au coronavirus et la journée internationale des travailleurs: “Le 1er Mai, cette année, on avait toutes les raisons de manifester pour protester contre l’ordonnance du gouvernement qui prévoit de déroger aux 48 heures pour aller à des semaines de 60 heures”, souligne Yves Veyrier alors que la fête du Travail est née aux États-Unis en 1886 à l’occasion d’un mouvement syndicaliste réclamant la journée de travail de huit heures et la semaine de 48 heures.

“Chacun va s’organiser au mieux pour afficher les choses aux fenêtres, faire des vidéos, aller sur les réseaux sociaux, organiser des chansons collectivement, comme ‘Bella Ciao’, des concerts de casseroles. On va occuper l’espace du 1er Mai autant que possible, en fonction des possibilités locales”, promet Éric Beynel, de Solidaires.

Des "casserolades" 

"Taper sur des casseroles". Voilà comment la France insoumise appelle ses partisans à manifester le 1er mai alors que le pays est toujours confiné à cause du coronavirus.

Le mouvement de Jean-Luc Mélenchon entend donner une couleur d’actualité à la journée internationale des travailleurs “pour dénoncer l’improvisation du gouvernement dans la gestion de la crise du coronavirus”. Dans un événement Facebook, le parti propose à midi, vendredi 1er mai, une “casserolade” générale aux balcons et de “la diffuser sur réseaux sociaux”, afin d’alimenter une manifestation virtuelle à laquelle appellent aussi de leurs vœux les syndicats qui traditionnellement organisent la fête du travail.

Si cette proposition de “casserolade” est suivie, ce ne sera pas la première fois que les Français sortent des casseroles pour aller manifester. On a pu en voir de manière très ponctuelle lors de la mobilisation contre la réforme des retraites de 2010 ou à Marseille ou Caen lors de manifestations locales pour les personnels de cantines scolaires ou des hôpitaux, à la fin des années 1990. Depuis le début du confinement, certains Français s’en servent aussi, à la marge, pour applaudir les soignants et réclamer plus d’argent public pour l’hôpital.

Mais la pratique est loin d’être répandue, contrairement à l’Amérique latine où elles sont une véritable tradition. Pendant la crise de 2001, en Argentine, elles étaient légion dans les cortèges et le reflex n’a pas été totalement abandonné. Au Brésil, la présidente Dilma Roussef a subi leur vacarme en 2016 dans des manifestations contre sa politique à la fin de son mandat. Au Venezuela, encore, nombreuses, pendant les affrontements de 2018 ou contre Nicolas Maduro en 2013. On voit aussi des casseroles au Chili lors des rassemblements de protestation contre la situation économique qui embrase le pays fin 2019. Le pays y avait déjà recours dans les années 1970...

Plus proche de nous, en Espagne pendant le confinement, les ’caceroladas” ont été utilisées pour montrer la défiance de certains envers le gouvernement de Pedro Sanchez.

Mettre en avant “les invisibles”

En France, c’est la situation particulière qui a donné cette idée aux mouvements politiques et syndicaux qui appellent à la mobilisation. “Pas question de confiner le 1er Mai!”, a lancé le secrétaire général de Force Ouvrière, Yves Veyrier.

Solidaires a lancé un appel commun avec la CGT, la FSU, les mouvements lycéens Fidl, MNL, UNL et étudiant Unef pour mettre en lumière le 1er mai les “oubliés” et les “invisibles de nos sociétés, qui continuent à travailler, le plus souvent au risque de leur propre vie”.

En ligne de mire, les personnels de santé, les salariés du commerce, de l’agroalimentaire, du paramédical, du social, du nettoiement, les agents du service public... “Il ne faut pas que de la reconnaissance purement morale de la part du gouvernement, mais des reconnaissances de qualification, de salaires. Les soignants auront à cœur de dire ‘Ne nous oubliez pas’”, dit Nathalie Verdeil (CGT)

#Construisons demain

La CFDT, la CFTC, l’Unsa et l’organisation de jeunesse Fage, qui célèbrent traditionnellement le 1er Mai ensemble; ne réuniront pas leurs adhérents cette fois, mais elles aussi vont réaffirmer sur les réseaux sociaux leurs revendications générales “pour l’emploi, la justice sociale et pour un modèle de développement respectueux de l’environnement et des femmes et des hommes au travail”. La CFDT joindra à tous ses posts sur les réseaux le hashtag #construisonsdemain.

Si manifester a effleuré l’esprit de quelques syndicats, l’idée a vite été abandonnée, car jugée trop compliquée à mettre en place. Et surtout, “on part du principe que le confinement et le minimum d’interaction entre les gens sont une des meilleures pistes pour éviter la propagation de ce virus, alors on essaie d’être cohérents”, dit Éric Beynel.

"C'est l'occasion de porter les exigences sociales que nous défendons depuis longtemps et que la crise a mises en exergue", expose Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT. Avec la FSU, Solidaires, les mouvements lycéens Fidl, MNL, UNL et étudiant Unef, il a appelé à mettre en lumière les "oubliés" et les "invisibles de nos sociétés".

En ligne de mire, les personnels de santé, les salariés du commerce, de l'agroalimentaire, du paramédical, du social, de l'entretien, les agents du service public, en première ligne dans la lutte contre le coronavirus.

Alors qu'une deuxième vague de l'épidémie est redoutée dans les hôpitaux, le Premier ministre a entamé les consultations avec le patronat et les syndicats avec comme enjeu de remettre les Français au travail face une récession économique historique.

Pour Bruno Le Maire, ministre de É'Economie, "il faut qu'un maximum de Français reprennent le travail", alors que le chômage a connu une envolée historique en mars (+7,1%).

"Tenons bon"Emmanuel Macron

Dans ce contexte, le secrétaire général de Force ouvrière Yves Veyrier a réclamé que le dispositif du chômage partiel soit prolongé, alors que le gouvernement prévoit de réduire la voilure à partir de juin.

La récession liée à la pandémie de Covid-19 se confirme chaque jour. Les seules deux premières semaines de confinement, en mars, ont provoqué une contraction de 5,8% du PIB au premier trimestre, selon l'Insee.

En vue du déconfinement progressif qui va conduire les Français à reprendre le travail, l'exécutif a présenté jeudi soir la liste des départements en rouge, orange et vert selon l'état de l'épidémie et des services de réanimation.

Sans surprise, l'ensemble de l'Ile-de-France et le quart nord-est du pays, les deux principales zones touchées, figurent intégralement en "rouge", ainsi que la Haute-Corse, le Cher, le Lot et Mayotte. La carte sera mise à jour quotidiennement jusqu'au 7 mai, avant le début du déconfinement prévu le 11, a précisé le ministre de la Santé Olivier Véran.

Le coronavirus a fait depuis le 1er mars 24.376 morts, dont 289 au cours des dernières 24 heures. Le directeur général de la Santé, le Pr Jérôme Salomon, a cependant souligné que les services de réanimation comptent désormais 4.019 patients (-188 en 24 heures) contre près de 7.200 le 9 avril.

La France est donc schématiquement départagée en trois parts à peu près équivalentes, entre rouge, vert et orange. Le 7 mai, ne resteront que deux catégories, vert et rouge, qui détermineront le niveau de relâchement des restrictions décrétées le 17 mars.

Dans les départements en vert, une moindre présence du virus permettra d'organiser un déconfinement plus large.

"Tant d'efforts faits depuis 46 jours. Ne les rendons pas vains. Tenons bon", a lancé le président Emmanuel Macron sur Twitter.

Et ailleurs sur la planète ?

La planète confinée fête vendredi le 1er-Mai sans aucune manifestation ou rassemblement prévu, en dépit de premières mesures de déconfinement en Europe, où le coronavirus est à l'origine d'un désastre économique d'ampleur inégalée, tout comme auÉtats-U-unis.

Dans ce pays, où plus de 2.000 personnes sont à nouveau mortes lors des dernières 24 heures, selon un dernier comptage jeudi soir, le président Donald Trump a de nouveau menacé la Chine. La jugeant responsable de l'irruption de la maladie, il a dit envisager des taxes douanières punitives après avoir confié sa certitude que le nouveau coronavirus provient d'un laboratoire chinois.

La fête du Travail, jour férié de très nombreux pays dans le monde (avec des exceptions comme leÉ Etats-Unis, le Canada ou l'Australie), ne donnera lieu cette année à aucun rassemblement traditionnel. C'est sans précédent dans l'histoire des syndicats.

Ces derniers ont néanmoins appelé à d'autres formes de mobilisation, virtuelles sur les réseaux sociaux, ou «perchées» sur les balcons et façades d'immeubles à l'aide de pancartes ou de banderoles.

AuÉ Etats-Unis, où cette journée n'est pas fériée, ce sont au total plus de 30 millions d'Américains qui ont fait une demande d'allocation chômage depuis la mi-mars, un record historique. Plusieurs entreprises ont commencé à publier des résultats, dont Amazon, le géant de la vente en ligne, qui a prédit un profit nul pour le prochain trimestre. Boeing, frappé de plein fouet par l'arrêt des voyages internationaux, a signalé le lancement d'un prêt obligataire de 25 milliards de dollars.

En Europe, la crise économique sans précédent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale n'a pas encore fait bondir les chiffres des licenciements, mais des millions de salariés sont au chômage partiel.

Une litanie de chiffres est également venue confirmer jeudi les plus sombres prévisions sur le continent, dont les principales places boursières ont terminé dans le rouge. La France a annoncé un effondrement de 5,8% de son produit intérieur brut (PIB) au premier trimestre, l'Espagne de 5,2%, l'Italie de 4,7%, et l'Allemagne un bond de 13,2% du nombre des chômeurs. A l'échelle de la zone euro, l'activité a chuté de 3,8%, selon l'institut Eurostat, qui prévient que le deuxième trimestre s'annonce encore pire.

La Banque centrale européenne (BCE), éternel pompier de la zone euro, s'est dite «prête» jeudi à renforcer son arsenal.

Bilan morose

Le bilan humain de la pandémie est tout aussi inquiétant. Elle a fait à ce jour au moins 230.000 morts dans le monde depuis l'apparition du nouveau coronavirus en Chine en décembre, selon un bilan établi par l'AFP à partir de sources officielles.

Les États-Unis sont de loin le pays le plus touché, avec plus d'un million de cas recensés et près de 63.000 décès. Mais l'Europe a payé le plus lourd tribut à la maladie, avec 27.967 morts en Italie, 26.711 au Royaume-Uni, 24.543 en Espagne et 24.376 en France. La Russie, où le Premier ministre Mikhaïl Michoustine a annoncé être contaminé, le cap des 1.000 morts a été franchi.

En Grande-Bretagne, le pic de la pandémie a été atteint, selon le Premier ministre BoriJ johnson, qui a promis un plan de déconfinement la semaine prochaine, à l'unisson d'autres pays européens, comme l'Allemagne, déjà engagés sur cette voie.

Fort de son succès dans la lutte contre la pandémie, l'Allemagne a adopté un catalogue de nouvelles mesures vers la levée du confinement. Églises et mosquées vont pouvoir rouvrir leurs portes, de même que les musées, salles d'exposition, zoos et mémoriaux. Cafés et restaurants restent néanmoins fermés, au moins jusqu'au 6 mai, et la chancelière Angela Merkel a indiqué que la question d'une ouverture des frontières avec les pays européens n'était "pas au programme" pour le moment, face au risque d'une deuxième vague.

C'est ce même risque qui a incité les autorités italiennes à ne pas rouvrir les écoles, à la différence de la France ou d'autres pays européens.

Au Portugal, où le gouvernement a annoncé jeudi un plan de dé confinement par étapes, seuls les lycées rouvriront le 18 mai, les écoles primaires et secondaires restant fermés jusqu'à septembre. Le championnat de football pourrait également reprendre le dernier week-end de mai.

Retour dans les stades ?

Ce qui ne sera pas le cas en France où la saison a été définitivement arrêtée jeudi. Le Paris Saint-Germain a été sacré champion.

Le football pourrait également revenir dans les stades, à huis clos, en Allemagne ou en Espagne, et avec plus d'incertitudes en Italie.

Il est aussi arrêté au Brésil où le confinement a été prolongé jeudi à Rio de Janeiro jusqu'au 11 mai, une décision prise à l'encontre des positions du président Jair Bolsonaro, qui défend coûte que coûte la reprise de l'activité économique.

L'état d'urgence sanitaire devrait également été prolongé au Japon au-delà du 6 mai, a laissé entendre le Premier ministre Shinzo Abe.

La Corée du Sud voisine a en revanche annoncé jeudi n'avoir enregistré aucun nouveau cas de transmission du coronavirus pour la première fois depuis l'apparition de la maladie dans le pays.

Un succès salué jeudi par le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies, Antonio Guterres. Dans les "exemples remarquables" montrant qu'il est possible de lutter ensemble contre le Covid-19 et le changement climatique, "il y a la Corée du Sud", a-t-il souligné.

Le pays asiatique a présenté un "pacte vert" pour sa reconstruction économique, avec la mise au rancart des centrales électriques au charbon et la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

(Avec AFP)

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