Agression du contrôleur de la SNCF : “aucune raison n’explique mon geste” déclare l’accusé

Tendu et peu à l’aise dans sa chemise rayée rose, Yassine Moumed, 29 ans, s’est présenté ce mercredi 19 mars devant la cour d’assises du Doubs pour y répondre des onze coups de couteau qu’il avait asséné à un contrôleur SNCF dans le Doubs en 2011, entraînant une importante grève de cheminots. Le verdict est attendu vendredi 22 mars au terme de trois jours d’audience à Besançon.

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L'accusé, un homme psychologiquement fragile de 29 ans, originaire de Mulhouse (Haut-Rhin), risque 30 ans de réclusion criminelle pour "tentative de meurtre au préjudice d'une personne chargée d'une mission de service public". 

"J’ai commis ces faits", mais "je n’en ai aucun souvenir" et "aucune raison n’explique mon geste", a affirmé Yassine Moumed devant les jurés, avec un air de jeune premier à la fois calme et confus. "Je ne peux toujours pas dire où j’allais, où j’étais, dans quel but. Je n’ai aucune réponse", a-t-il insisté.

Le 6 octobre 2011, en milieu de matinée, Yassine Moumed avait refusé de présenter son titre de transport aux deux contrôleurs SNCF du train Lyon-Strasbourg qui le lui demandaient, avant de se scarifier avec un couteau.

L'un des contrôleurs, Thierry Hemet, était alors allé préparer un procès verbal, pendant que son collègue, Bernard Mortellier, allait chercher la trousse de secours pour appliquer les premiers soins au blessé. Le passager avait suivi M. Mortellier, 56 ans, et lui avait porté onze coups de couteau, dont deux dans des parties vitales.

Touché au niveau du visage et du thorax, le contrôleur avait néanmoins réussi à repousser son agresseur dans un compartiment et à fermer la porte. Le contrôleur avait été transporté dans un état grave au CHRU de Besançon, où il avait finalement survécu. Interpellé à sa descente du train, Yassine Moumed avait déclaré qu'il ne se rappelait pas ce qui s'était passé, sans nier toutefois son implication dans les faits.

Des analyses toxicologiques avaient révélé qu'il avait consommé du cannabis. Cette violente agression d'un contrôleur de train avait provoqué d'importantes perturbations sur tout le réseau SNCF pendant les deux jours qui suivirent, de nombreux collègues de M. Mortellier ayant exercé leur droit de retrait.

"Le droit de retrait était un signal d’alerte donné à l’entreprise pour qu’elle prenne conscience de la sécurité des agents et des passagers", a déclaré à Richard Tramunt, secrétaire du CHSCT (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) des contrôleurs à Strasbourg et délégué Sud-rail. "Mais la SNCF n’a toujours pas tiré les conséquences de cette agression : il y a trop de trains où les contrôleurs sont seuls", déplore-t-il, rappelant que les syndicats demandent "deux contrôleurs par train, dans tous les trains".

Dans le Lyon-Strasbourg Bernard Mortellier était pourtant accompagné d’un collègue. C’était "une chance", souligne le syndicaliste. "Ils étaient deux, ce qui a permis de donner l’alerte aux secours qui ont pu arriver rapidement et sauver Bernard".

La direction de la SNCF, qui s’est portée partie civile aux côtés de ses deux agents, n’a pas souhaité s’exprimer sur le sujet. Son avocat, Me Julien Dreyfus, souligne que "la SNCF a fait bloc derrière ses deux agents, car c’est intolérable que l’un ait été menacé de mort et l’autre violement agressé". "Les deux contrôleurs sont très impressionnés et angoissés car ce procès les renvoie à des faits très douloureux et les renvoie à leur agresseur", a ajouté le conseil qui défend également les deux hommes.

L’accusé a déjà été condamné plusieurs fois pour des faits de violence sans arme, et hospitalisé à quatre reprises suite à des scarifications."L’enjeu principal des débats portera sur la personnalité de l’accusé et nous nous appuierons sur ce qui permet d’éclairer cette personnalité", a indiqué son avocat Me Jérôme Pichoff. Selon lui, Yassine Moumed "ne se souvient effectivement de rien, il n’a d’ailleurs pas reconnu sa principale victime à l’audience".

(Source : AFP)

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