La réforme des institutions sur un chemin semé d’embûches

Entre une droite très offensive, un MoDem qui se fait entendre, une gauche qui proteste, quelles sont les chances de la réforme des institutions voulue par Emmanuel Macron d’aboutir, sans passer par la case référendum?

© Assemblée nationale

La droite à l'offensive

Les principales figures des Républicains -leur président Laurent Wauquiez, les figures du Parlement Gérard Larcher, Christian Jacob et Bruno Retailleau- avaient réagi mercredi aux annonces de l'exécutif par un communiqué très offensif. Le président du Sénat Gérard Larcher a enfoncé le clou jeudi soir dans les colonnes du Figaro.

En dépit des concessions obtenues, sur le non-cumul des mandats dans le temps notamment, il a dit son "total désaccord"avec la réduction de 30% du nombre de parlementaires, car elle ne permet plus selon lui une "juste représentation des territoires".

M. Larcher acte en revanche l'introduction de 15% de proportionnelle aux législatives, une "voie de passage"entre les souhaits de l'exécutif et l'hostilité des défenseurs traditionnels du scrutin majoritaire, à commencer par LR. "Le moins il y en aura, le mieux cela vaudra", avait jugé le chef de file des sénateurs LR Bruno Retailleau, tandis que pour son homologue de l'Assemblée Christian Jacob, "la bonne dose""c'est zéro".

"Place au débat parlementaire", résume-t-on, laconique, dans l'entourage de Laurent Wauquiez, peu disposé à offir un succès politique à Emmanuel Macron. Et le parti demande en plus un "paquet régalien"face au "terrorisme"non prévu à l'ordre du jour par le gouvernement.

Enchères au MoDem 

Les propositions sont "un point de départ et non pas un point d'arrivée"et "il y a beaucoup de choses qu'on peut améliorer", a rapidement averti le président du MoDem François Bayrou, qui n'a pas obtenu gain de cause sur sa demande de 25% de proportionnelle.

"15%, c'est un début", selon la ministre MoDem Jacqueline Gourault. Ce taux ne "satisfait"pas l'objectif de "sortir durablement de la bipolarisation et représenter les différentes sensibilités politiques", ont averti les députés MoDem. 

En coulisses, certains espèrent que si le "deal"avec le Sénat capote, "on rediscutera de la dose". Même si, selon une source centriste, "dans l'accord Bayrou-Macron de campagne, il n'y avait pas de chiffre".

 Gauche en embuscade

Pas forcément de rejet en bloc, mais une salve de critiques sur une réforme d'"inspiration bonapartiste".

 En plus d'une "absence d'ambition constitutionnelle", députés et sénateurs PS s'alarment d'un "déséquilibre"accru en faveur de l'exécutif, surtout avec moins de parlementaires.

Jean-Luc Mélenchon perçoit, "sous couleur de modernité, un nouvel abaissement du Parlement"et "un retour à l'Ancien régime"avec de possibles "lois locales". Les Insoumis veulent une VIe République et une proportionnelle intégrale.

Les communistes, vent debout contre la révision "la plus antidémocratique depuis la naissance de la Vème République"au profit "d'une technocrature", demandent un référendum car "c'est au peuple de décider".

 L'inconnue du référendum 

En cas d'impasse, Emmanuel Macron n'a jamais exclu le recours à un référendum, arme constitutionnelle très encadrée et pouvant être à double tranchant.

Mais "nous nous plaçons plutôt dans une logique de travail parlementaire et donc de réunion du Congrès"in fine pour le vote du texte constitutionnel (qui requiert la majorité des 3/5e des suffrages exprimés), non dans une logique de référendum, a dit jeudi le Premier ministre.

Les trois projets de loi de réforme (ordinaire, organique et constitutionnel) seront au menu de l'Assemblée probablement en juin-juillet, du Sénat à la rentrée, en vue d'une adoption définitive repoussée à 2019.

Congrès ou référendum sur le volet constitutionnel (suppression de la CJR, réforme du CSM, fabrique de la loi), le choix sera "à l'appréciation du président après que les textes auront été votés dans les mêmes termes", ce qu'Edouard Philippe "pense possible".

Pour les textes simple et organique, porteurs des sujets les plus épineux (proportionnelle, réduction des parlementaires, non-cumul dans le temps), l'exécutif n'a besoin que de sa majorité à l'Assemblée. Certains LREM et MoDem préfèreraient sur ce volet un référendum (article 11) à "un compromis défavorable avec le Sénat", d'autres appellent à la prudence. Si Emmanuel Macron jouait cette carte, ce serait, selon Christian Jacob (LR), pour chercher "un plébiscite".

 (Avec AFP)

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