“Chaque médicament devrait être évalué sur des critères objectifs et non polémiques”

Les deux professeurs Bernard Debré et Philippe Even viennent de sortir un guide passant au crible 4 000 médicaments. Ils ont établi une liste noire de 58 médicaments qu’ils jugent dangereux. Face à cette liste, nous avons demandé l’avis de Fabrice Flamand, président du conseil départemental de l’ordre des médecins du Doubs. il est également médecin généraliste à Besançon… 

 

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maCommune.info : Comment, en tant que président du conseil départemental de l'ordre des médecins du Doubs et en tant que médecin généraliste à Besançon accueillez-vous cette "liste noire" ? 

Fabrice Flamand  : Difficile d'avoir une réponse exhaustive sur une telle liste. Il existe des médicaments à problème dont certains apparaissent dans cette liste, ils sont connus et font l'objet de recommandations de prescription. Il est souvent possible de les remplacer par des produits plus anciens bien connus et moins couteux.

mC : "Le guide des 4 000 médicaments utiles, inutiles, ou dangereux" parle de centaines de nouvelles molécules inefficaces. Constatez-vous depuis quelques années, l'apparition de médicaments qui ne servent à rien ? Comment les médecins résistent à ce phénomène ?  

FF : Il existe une revue périodique professionnelle totalement indépendante de l'industrie pharmaceutique qui est lue par de nombreux médecins et qui leur permet de se faire une opinion indépendante.

mC : Les 58 médicaments présentés dans la liste noire sont-ils réellement "dangereux" ?  Y a-t-il des médicaments plus dangereux que d'autres ? 

Un médicament n'est ni bon ni mauvais, il répond à un certain nombre d'exigence et il doit être prescrit par un médecin qui est responsable de ses actes. L'exemple des anticoagulants est significatif. Ces produits sont indispensables et pourtant ils représentent en nombre le plus important contingent d'accidents thérapeutiques hospitalisés (hémorragies). Cela dit, certaines nouvelles molécules ont peu d’intérêt et l'autorisation de mise sur le marché et surtout le prix accordé sont parfois discutables.... 

mC : Le Leem, l'organisation professionnelle des entreprises du médicament, estime que les deux auteurs de l'ouvrage  "misent de manière opportuniste sur la vague de défiance qui a touché, dans le sillage de l'affaire Mediator, le système de santé" L'organisation parle d'amalgames et d'approximations. Qu'en pensez-vous ? 

FF : Il est vrai que l'affaire Médiator entretien un climat de suspicion qui ne me parait pas faciliter l'information juste du public et de nos patients. Toutefois, il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain car il est indispensable d'avoir à disposition de nouvelles molécules pour prendre en charge les pathologies lourdes ou chroniques. De ce fait, certains médicaments ne vont révéler leurs effets secondaires que lorsqu'ils seront prescrit à grande échelle. C'est là que nous devons être vigilant et si l'effet secondaire est avéré et dangereux, le médicament doit sortir plus rapidement du circuit de mise à disposition.

Il me semble donc peu opportun de diffuser ainsi au grand public une liste noire dont chaque médicament devrait être évaluer sur des critères objectifs et non polémiques.

Rappelons nous l'horreur de la thalidomide prescrite au début des années soixante aux femmes enceintes et à l'origine de graves malformations chez les nouveau nés. Aujourd'hui ce médicament est de nouveau utilisé dans des indications très ciblées en hématologie...

 Aller plus loin : 


Dans l'Obs : le guide des médicaments inutiles..... par LeNouvelObservateur

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