L’opération séduction de Macron devant les maires en colère

Quelque 2 000 édiles étaient conviés à l’Élysée mercredi soir pour une séance de questions-réponses avec le chef de l’État, sur fond de fortes tensions.

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Devant des élus méfiants, le chef de l'État, très à l'aise, a défendu son bilan depuis le début du quinquennat. "Je sais que votre quotidien n'est pas facile, celui du gouvernement ne l'est pas davantage", a-t-il assuré, multipliant plaisanteries et clins d'œil en direction des élus. "L'année prochaine, je serai au congrès dans votre salle", a-t-il assuré. Face aux défis auxquels la France est confrontée, "on a une responsabilité commune, c'est d'être ensemble", a affirmé le chef de l'État dans une salle des fêtes bondée.

Emmanuel Macron a tenté de rassurer des maires souvent très inquiets. "Je sens une inquiétude face à tous les changements, parfois des incompréhensions, mais je sens beaucoup d'attente, il ne faut rien céder face à un vent mauvais qui voudrait que tout soit la faute de l'élu" , a-t-il affirmé. Réforme fiscale, modification "à la marge" de la loi NOTRe sur la réforme territoriale, différenciation entre les territoires... Le président a souligné sa volonté de dialoguer avec les élus et leurs associations pour faire bouger les choses.

Des questions concrètes de la part des maires

Dans une allusion au mouvement des Gilets jaunes, Emmanuel Macron a évoqué "une forme d'injustice". "Car beaucoup de nos concitoyens pensent que c'est le gouvernement quand il y a une hausse des prix à la pompe et voient presque mon image quand ils font le plein. Mais, quand ils voient les primes à la conversion, ils pensent que c'est le concessionnaire." Des maires courtois mais revendicatifs l'ont interrogé sur des problèmes très concrets : l'appauvrissement des commerces, l'afflux de migrants mineurs, la qualité de l'air ou encore le montant de la péréquation fiscale qui fixe les dotations de l'État aux communes.

"On en a un peu marre", a résumé un élu qui a dénoncé "une souffrance sociale en France, dans les territoires ruraux". Très à l'aise, distribuant la parole, Emmanuel Macron a répondu en rafale à toutes les questions, citant les projets du gouvernement sur la revitalisation des centres-villes, le plan pauvreté, les discussions sur la prise en charge des migrants mineurs. Plus globalement, il a plaidé contre les "injonctions paradoxales" en s'emportant contre ceux qui demandent à la fois moins de taxes et plus d'action publique. De lui-même, il a plusieurs fois défendu la "trajectoire environnementale" de la hausse des taxes sur les carburants. "C'est pas bibi", a-t-il encore lancé à propos des modifications de dotations pour certaines communes en fonction de règles actuelles de péréquation.

Des élus venus de toute la France avaient été invités à écouter le chef de l'État."On aurait presque pu mettre un gilet jaune. Mais, quand on reçoit une invitation, il faut y répondre, c'est aussi un moment pour s'exprimer. Ici, les gens seront polis, mais, au congrès de l'AMF, ça aurait été plus chaud", expliquait Véronique Del Fabro, maire de Hudiviller, un village de Meurthe-et-Moselle. La rencontre avec les maires avait été précédée en fin d'après-midi d'une réunion de travail avec le bureau de l'AMF, conduit par son président François Baroin (LR).

Des maires toujours sceptiques

Selon l'Élysée, Emmanuel Macron a appelé à "arrêter les fausses polémiques et la scénarisation de nos désaccords". "Vous êtes des élus. Nous avons la République en partage. Avançons", a insisté le chef de l'État auprès des élus. Mais, à l'issue de la réunion, plusieurs membres du bureau ont préféré ne pas assister à l'intervention du chef de l'État, considérant qu'Emmanuel Macron aurait dû s'exprimer devant l'ensemble des maires réunis en congrès jusqu'à jeudi Porte de Versailles.

"Nous avons eu le sentiment que, si nous étions écoutés, nous étions peu écoutés. Le président de la République a pour l'essentiel confirmé ses positions, sans véritable inflexion et avec une volonté modérée d'aller vers une véritable négociation", a déploré à l'Agence France-Presse le vice-président de l'AMF, André Laignel (PS), à l'issue de la rencontre.

(AFP)

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