Une cour d’appel suisse reconnaît l’état de nécessité face à l’urgence climatique

Une cour d’appel de Genève a acquitté mercredi 14 octobre 2020 un jeune militant qui avait dégradé le siège du Crédit Suisse pour dénoncer ses investissements dans l’énergie fossile, au nom de « l’état de nécessité » face à l’urgence climatique, rapporte l’agence ATS.

En octobre 2018, le jeune homme et ses acolytes du collectif Breakfree Suisse, avaient apposé des mains couvertes de peinture rouge sur le siège du géant bancaire à Genève. "Ce verdict ne constitue pas un blanc-seing pour commettre d'autres dommages. Il ne doit pas non plus être source de réjouissance, car il est le constat d'un échec imminent", a déclaré en conclusion la présidente du tribunal Gaëlle Van Hove.

Pour le tribunal, l'action "mains rouges" s'inscrit pleinement dans la logique des mesures prônées par le Conseil fédéral pour infléchir la courbe du réchauffement climatique et qui misent sur le risque réputationnel de la place financière. Citant un article du quotidien Le Temps, la Cour considère qu'une action comme celle de Genève n'aura peut-être pas été vaine. En 2019, Credit Suisse a pris conscience de son rôle dans le réchauffement climatique et a réduit ses investissements problématiques.

"Les juges ont pris leurs responsabilités en tant que troisième pouvoir"

"Les juges ont pris leurs responsabilités en tant que troisième pouvoir", a salué Me Laïla Batou, l'avocate du prévenu. La décision de mercredi prend le contrepied de celle que vient de rendre la Cour d'appel de Renens, près de Lausanne et à moins d'une heure de route de Genève. Le 24 septembre, cette dernière avait condamné 12 militants suisses qui s'étaient introduits en novembre 2018 dans une succursale du Credit Suisse déguisés en Roger Federer, pour protester eux aussi contre les investissements dans les énergies fossiles de la banque, sponsor du champion de tennis suisse.

En janvier, un juge unique avait créé la sensation en relaxant ces prévenus au bénéfice de l'"état de nécessité", estimant qu'ils avaient légitimement agi face à l'urgence climatique. Mais, en septembre la Cour d'appel a estimé que les militants auraient pu utiliser d'autres moyens légaux, notamment politiques, et leur geste n'a pas directement freiné les émissions de gaz à effet de serre.

Les trois magistrats avaient suivi l'avis du parquet, qui avait appelé à "faire du droit, pas des sentiments", et condamné les jeunes militants de Lausanne Action Climat. Le Ministère public et la banque ont 30 jours pour faire recours à l'acquittement de mercredi auprès du Tribunal fédéral. Déjà saisie dans l'affaire de Renens, la juridiction suprême suisse aura pour tâche de trancher le débat juridique sur l'urgence climatique.

(AFP)

Quitter la version mobile