Fermetures en série : la rue de Belfort en perte de vitesse ?

+ d'infos • L’Épicerie bisontine s’était implantée rue de Belfort le 7 novembre 2022 à Besançon. À peine un an plus tard, la boutique a définitivement fermée ses portes après les vacances de Noël sans que l’on en sache réellement la cause. À cela s’ajoute le départ d’Alain Ricot fin décembre 2023 et la fermeture du bar des Chaprais le 31 janvier dernier. La rue de Belfort est elle en train de perdre en attractivité ? 

© Élodie R.

L’Épicerie Bisontine a fermé ses portes "après les fêtes de fin d’année 2023" selon la gérante d'un commerce situé non loin, quelques semaines plus tard, c’est le bar des Chaprais qui tirait lui aussi définitivement le rideau là encore sans réellement annoncer sa fermeture, hormis aux habitués des lieux. 

Mais pour les deux commerces, aucun écriteau sur la porte, ni d'informations sur leurs réseaux sociaux. Même Google n’a apparemment pas été averti de la fermeture de ceux-ci puisqu’ils sont toujours signalés ouverts aux heures d’ouverture habituelles par le moteur de recherche.  

Des fermetures brutales et pour des raisons pas toujours très claires si l’on en croit un des fournisseurs de l’Épicerie Bisontine qui nous a confirmé que le gérant lui avait laissé une facture non payée avant de finalement ne plus donner signe de vie.

Un gérant qui "fait le mort"

Des clients lui ont également rapporté que le commerce vendait son produit plus cher que le tarif fixé par le fournisseur. "Il a vu que ça se vendait bien alors au lieu de le vendre 19,95€, le produit serait directement passé à 22€ d’après certains de mes clients". Ceux-ci s’étant aperçus de l’augmentation, ils en ont d’ailleurs fait la remarque au gérant de l’épicerie qui aurait répondu que le fournisseur avait augmenté ses prix. "Ce qui est totalement faux" dément le fournisseur qui assure que le gérant "a toujours payé le même prix ma marchandise, comme tous mes revendeurs qui ont d’ailleurs le même tarif".

Une méthode peu professionnelle mais plus que tout, c’est la manière de faire qui a le don d’irriter le fournisseur : "ce qui m’énerve le plus c’est qu’il fasse le mort" lâche-t-il alors qu’il dit avoir pourtant proposé au gérant des facilités de paiement (règlement en plusieurs fois sans frais). Malgré un premier acompte versé, le fournisseur reste toujours en attente, depuis plusieurs mois maintenant, d’un dernier règlement. Depuis, l'ex-gérant ne répond plus aux appels du fournisseur et n’a d’ailleurs pas non plus répondu à nos sollicitations téléphoniques. 

7.500€ de loyers impayés au propriétaire

Le propriétaire du local de l’Épicerie nous a d’ailleurs contactés pour nous informer que le gérant ne lui avait pas réglé de loyer "depuis le mois d’août 2023" et qu’il avait dû prendre attache avec un huissier "depuis octobre pour récupérer ma créance" soit "environ 7.500€". Mais à ce jour "impossible d’avoir le règlement même après saisie sur compte" et le gérant laisserait selon lui "pourrir la situation".  

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Ne répondant plus aux sollicitations, le gérant n’a pas non plus rendu les clés du local, aujourd’hui à moitié vide, et que le propriétaire est dans l’incapacité de louer. "En tant que particulier je suis désemparé. J’ai des mensualités à payer. Cette situation me met à mal financièrement et c’est à moi d’engager encore des frais d’avocat. Il n’a aucun scrupule, il fait le mort" nous a-t-il expliqué. L’homme avait pourtant totalement rénové le local en 2020, aujourd’hui celui-ci va rester inoccupé et personne ne sait durant combien de temps. "La moindre des choses serait qu’il mette fin au bail et me rende mon local. Mais non, les loyers vont se succéder en impayés" analyse amèrement le propriétaire. 

Bar des chaprais : un différend avec la propriétaire

Même son de cloche du côté du bar des Chaprais où l’un des commerces du même quartier  nous a confirmé que le gérant était parti sans régler "une belle somme qui va manquer". 

Une information totalement réfutée par une source interne qui exclue tout impayé et justifie la fermeture de l’établissement par un désaccord avec la propriétaire qui aurait mené au tribunal pour loyer impayé. 

Malgré des dettes réglées, selon un accord conclu par SMS avec la propriétaire, l’affaire aurait néanmoins été portée au tribunal condamnant le gérant au motif de la "clause résolutoire" mais avec un montant dû de "zéro". Une fermeture "par dépit" qui survient après six ans d’activité et malgré un chiffre d’affaires au beau fixe depuis quelques mois si l’on en croit cette même source.

© Élodie R.

Une accumulation de divers facteurs pour Alain Ricot

Pour Alain Ricot, c’est une accumulation de facteurs qui a conduit le chocolatier à abandonner définitivement son enseigne rue de Belfort : explosion des charges et des matières premières, changement des habitudes de consommation des gens depuis le covid ou encore différend avec la propriétaire. La chute constante du chiffre d’affaires a été le dernier élément déclencheur qui a conduit l’artisan à mettre la clé sous la porte.

Mais ici, les choses ont été faite en toute transparence. La fermeture du commerce rue de Belfort a en effet été annoncée dans les médias et pour ceux qui auraient manqué l’information, d’énormes affichages sur les vitrines de l’ancienne boutique rappellent ce déménagement. 

© Élodie R.

Un turnover pas si surprenant pour l'association des commerçants

D’ailleurs, malgré cette fermeture, Alain Ricot ne se montre pas spécialement inquiet pour la rue de Belfort qui reste, selon lui, "l’une des rues les plus commerçantes de la ville". S’il concède que "2024, 2025 seront encore très difficiles pour tout le monde" il estime toutefois que les commerces de bouche sont "logiquement protégés". Notamment parce qu'ils souffrent moins de la concurrence d'internet et aussi parce que "les jeunes sont plus à cheval sur leur alimentation que les 40-50 ans, ils sont d’accord avec l’idée de payer un peu plus cher si c’est pour gagner en qualité".

Un point de vue partagé par Rolande Faivre Chalon, la présidente de l’association des commerçants des Chaprais : "dans la rue de Belfort on a surtout de l’alimentaire qui n’est pas un secteur autant en difficulté que l’habillement par exemple". Le turnover actuel ne serait donc pour elle, ni surprenant, ni significatif d’un manque d’attractivité de la rue de Belfort.

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