Bernardin Kingue Matam, un haltérophile de haut niveau licencié à Besançon, sorti de la précarité

Être un espoir de médaille pour la France aux prochains JO de Rio et à peine réussir à payer son loyer : c’était le quotidien précaire de l’haltérophile Bernardin Kingue Matam, étudiant d’origine camerounaise, licencié à « La Française de Besançon Haltérophilie », avant qu’il ne bénéficie d’un dispositif en faveur des sportifs de haut niveau.

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"Etre sportif de haut niveau, ce n'est pas facile, on essaie difficilement de joindre les deux bouts financièrement", confie Bernardin Kingue Matam, 25 ans, qui soutient la proposition de loi sur le statut des sportifs de haut niveau qui sera votée lundi 8 juin 2015 à l'Assemblée nationale.

L'athlète d'origine camerounaise, aux yeux doux et à la musculature affûtée, est arrivé en France à l'âge de 14 ans. Il a été naturalisé en juillet 2011, notamment grâce à ses excellents résultats sportifs, avant de remporter le bronze pour la France aux Championnats d'Europe 2012 et 2013 (-69 kg).

Licencié à "La Française de Besançon Haltérophilie", il a vécu plusieurs années avec les 300 euros mensuels versés par son club, des bourses universitaires aléatoires et des primes du Conseil général du Doubs, octroyées selon l'aléa de ses victoires. "C'est avec mes primes que j'essayais difficilement de fonctionner pour vivre, payer mon loyer de 360 euros par mois, mes factures et ma voiture", explique Matam. "Ce n'était pas évident, mais je suis économe et j'essayais de gérer au mieux mes finances", ajoute cet enfant d'une fratrie de 14 frères et sœurs, dont 11 pratiquent l'haltérophilie.

Un CDI qui change la vie

Loin du cliché des footballeurs touchant des sommes mirobolantes, la plupart des sportifs de haut niveau doivent laborieusement composer entre un entraînement intensif et l'université, ou un emploi compliqué à trouver.

"On est un peu entre deux portes : le sport et les études. C'est très compliqué de faire les deux en même temps et on ne peut pas être vraiment à fond dans l'un et l'autre", estime l'haltérophile. À l'université de Franche-Comté, "en deuxième année d'éco-gestion, c'était compliqué de suivre les cours et d'aller aux examens, car j'étais tout le temps en déplacement pour mon sport", se souvient-il.

Car cette précarité quotidienne est désormais terminée. Depuis décembre dernier, Matam bénéficie d'un dispositif du ministère des Sports pour la professionnalisation des sportifs de haut niveau. Dans ce cadre, il a signé un CDI avec l'entreprise Vinci Autoroutes comme assistant de contrôle de gestion, à la direction des ressources humaines. Pour un salaire de 1.850 euros bruts mensuels, l'athlète a un emploi qui lui permet de conjuguer vie professionnelle et sportive, avec des horaires de travail aménagés.

"Ça me fait pousser des ailes, maintenant je peux envisager d'aller beaucoup plus haut", estime Matam, qui avait "besoin de ça pour être beaucoup plus fort".

Record personnel battu

Et les résultats sont là : l'haltérophile a battu son record personnel de 15 kilos depuis qu'il a trouvé un employeur et qu'il a intégré l'Insep (Institut national du sport, de l'expertise et de la performance) à Paris en janvier. Et Matam a décroché l'argent aux Championnats d'Europe 2015 à Tbilissi (Géorgie) en avril, sa "meilleure performance". Le changement se ressent aussi dans sa vie de tous les jours : "Je vais pouvoir déménager de mon appartement de 15 m2 à Besançon, où je peux à peine bouger, et changer mes équipements sportifs usés sans devoir demander de l'argent au club".

Depuis qu'il a signé son CDI, l'espoir de l'haltérophilie française, qui vise le podium aux JO-2016, se sent "plus autonome" et "plus zen". "Je ne m'inquiète plus pour l'avenir, car ma carrière professionnelle est assurée. Donc je peux lâcher les chevaux côté sport", confie-t-il, le sourire aux lèvres.

L'athlète se prépare actuellement pour les Mondiaux en novembre aux Etats-Unis. "Maintenant, quand je suis à l'entraînement, je ne pense qu'à la performance, sans soucis dans la tête."

(Source : AFP)

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