Procès Zepeda : le père de l’accusé démonte l’enquête policière devant la cour

La première journée d’audience du procès en appel de Nicolas Zepeda s’est poursuivie lundi après-midi à partir de 14h08 après  environ deux heures de suspension à la mi-journée.

Les parents de Nicolas Zepeda. ©

Cet après-midi, des auditions de témoins sur la personnalité de l’accusé dont une par visio-conférence du Chili devaient se déroulées ainsi que les témoignages des parents de Nicolas Zepeda.

L’audition de témoins sur la personnalité de l’accusé par visio-conférence avec le Chili est reportée à un moment ultérieur en raison d'un problème technique. C’est finalement Humberto Zepeda, le père de l’accusé qui est passé à la barre en tant que témoin. Après s’être présenté, il a évoqué le cadre familiale dans lequel il a été élevé puis celui dans lequel il a élevé Nicolas Zepeda, aîné de ses deux soeurs, l’une chirurgienne, l’autre infirmière. Il a également précisé être sans emploi ni revenu depuis 3 ans, à l’inverse de son épouse qui travaille encore actuellement. Humberto Zepeda a montré une certaine émotion en évoquant le décès récent de sa mère, la grand-mère paternelle de Nicolas Zepeda, souffrant d’un cancer du sein, dont les derniers mots auraient été : ”que va-t-il se passer pour Nicolas ?”

Il a ensuite parlé des réactions au Chili sur l’affaire de son fils en rapportant notamment que la presse chilienne se demandait pourquoi l’Etat chilien avait-il accepté l’extradition de Nicolas Zepeda ”sans antécédent et sans assez de preuves.” 

L’"enquête" du père de l’accusé 

À la suite de cela, le père de l’accusé a démonté quasi point par point les investigations de la police française dans l’enquête sur la disparition de Narumi Kurosaki, alors que l’objectif de son témoignage était de parler de la personnalité de son fils.

Malgré les rappels du président de la cour pour un recentrage sur la personnalité de Nicolas Zepeda comme prévu au programme de cet après-midi, le père a continué de dénoncer tous les dysfonctionnements des investigations selon lui, en précisant que lui aussi avait enquêté de son côté depuis l’extradition de son fils, comme un avocat, mais surtout comme un père prêt à tout pour sauver son fils de la prison à vie, aux yeux des juré(e)s. 

Les parents de Nicolas Zepeda. © Alexane Alfaro

À chaque fois que le président lui demandait de revenir sur la personnalité de son fils, Humberto Zepeda expliquait que les photos et vidéos qu’il avait apportées devaient lui servir de support pour en parler. Étant donné que le président lui a demandé en début d’audience qu’il voulait les voir avant de les présenter aux juré(e)s, le père de l’accusé n’a pas beaucoup parlé de la personnalité de son fils. Il a donc continué sans relâche à pointer du doigts des ”problèmes” dans les investigations policières. Il a même tenté d’accuser Arthur Del-Piccolo, le petit ami de Narumi lors de sa disparition. 

Quarante minutes plus tard, le président le coupe de nouveau pour lui rappeler une troisième fois de se recentrer sur la personnalité de son fils. Hésitation de la part du père. Il se met à parler de son fils en citant une lettre de l’une des soeurs de l’accusé. Le père de famille a également cité d’anciennes petites amies de son fils qui auraient affirmé par écrit qu’il n’est ni ”jaloux” ni ”violent”. 

Par ailleurs, il a déclaré : ”Nicolas a de très bons avocats, mais je veux vous parler de ce que j’ai dans l’âme, vous transmettre qui est mon fils, c’est impossible que Nicolas ait fait ça, je ne dis pas ça parce que je suis son père, d’autres personnes le disent.”

Et de conclure : ”La famille de Narumi et ma famille voulons la vérité. Et la vérité va donner la justice, mais avec cette enquête, c’est difficile. (…) La famille de Narumi et ma famille ne méritent pas cela. Cela mérite des réponses plus complémentaires, des preuves scientifiques, qui ne donnent pas la possibilité du doute. (…) Comment une enquête peut aboutir sans savoir où est Narumi ?” En terminant : ”Je m’excuse si j’ai été excessif, mais c’est un sentiment que je voulais exprimer. Pendant 3 ans, je me suis arrêté de travailler pour suivre cette affaire et je crois très clairement, Monsieur le président, que Nicolas est incapable de faire ce dont il est accusé.”

Le président lui a ensuite posé quelques questions dont l’une sur le suivi psychologique de Nicolas Zepeda, à laquelle le père a répondu : ”en tant que père j‘ai assumé les études et la santé de mes enfants, je sais que Nicolas avait demandé une visite chez un psychologue, mais je suis certain qu’il n’a jamais été hospitalisé et qu’il n’y a pas eu de séance chez un psychologue.”

Me Galley, avocate de la famille de Narumi Kurosaki, prend ensuite la parole en lui disant que ”personne ne peut vous reprocher de croire en l’innocence de votre fils." Elle a ensuite rebondi sur plusieurs éléments cités par Humberto Zepeda dont la jalousie nié par le père : ”Votre fils lui-même reconnaît cette jalousie” dans un message faisant partie des éléments de l’enquête où Nicolas Zepeda écrit à Narumi dans un message : ”Je ressens de la jalousie”.

Me Sylvaie Gallet, avocate de la famille de Narumi Kurosaki. ©

Audience suspendue une vingtaine de minutes. Reprise à 17h49.

"Vous connaissez votre fils ?”

Humberto Zepeda revient à la barre des témoins. 

”Quel qualificatif utilisez-vous pour votre fils ?”, lui a demandé Me Galley. Le père de Nicolas Zepeda s'est de nouveau éparpillé sans répondre à la question en évoquant une rencontre avec Zinédine Zidane dans le cadre d’une expérience footballistique. 

”Comment Nicolas Zepeda exprime-t-il sa colère ?” a insisté Me Galley. ”Il ne participe pas aux confits, il n’a jamais eu de problème avec la justice pour des violence. Le comportement de Nicolas est très clair, quand il y a conflit, il quitte les lieux, il ne cherche pas la bagarre”, lui a-t-il répondu.

Etienne Manteaux, avocat général et procureur de la République de Besançon. © Alexane Alfaro

Me Pichoff, avocat temporaire d’Arthur Del-Piccolo, lui a également posé quelques questions principalement sur la relation entre Nicolas Zepeda et Narumi Kurosaki et sur ses relations avec son fils.

Etienne Manteaux, l’avocat général, est monté au créneau directement : ”M. Zepeda, vous nous avez parlé de façon spontanée pendant 2 heures, mais moins de 2 minutes de votre fils. Vous connaissez votre fils ?” L’avocat général a insisté : ”Comment se fait-il qu’il n’y ait pas plus de témoins ? Votre fils a du mal à parler de lui, vous avez du mal à parler de lui, il y a une amie qui n’est même pas sa petite amie, pourquoi n’avez-vous pas faire témoigner plus de personnes ? Les petites amies ne sont pas là, le cousin n’est pas là, etc. Personne ne l’aime Nicolas Zepeda pour ne trouver personne pour venir témoigner ?”

Père et fils en larme

Si Humberto Zepeda a été ému à quelques reprise à la barre, il a été en larme en répondant à l’une des questions de l’un des avocats de son fils, Me Cormier :

”En un mot, que pouvez-vous raconter sur votre fils ?”, lui a-t-il demandé, pour tenter d’obtenir enfin une réponse. En larme, le père de famille lui répond : ”Le chili est un pays qui souffre beaucoup, le Chili est un pays où on a vécu de nombreux tremblements de terre, avec beaucoup de décès, le Chili souffre des incendies, le plus grand taux de personnes SDF, on le trouve au Chili. Et ce jeune - (en montrant du doigt son fils) - a passé des semaines pour construire des toits, des lieux de vie pour ces victimes des incendies. Il a construit des projets pour aider des gens, ce jeune qui est là a accompagné ses soeurs, il fait partie de la société, quand il sortira, il fera le bien, à l’université il enseignait aux autres élèves. Le jour où Nicolas sera libre, il fera le bien parce que dans sa tête il n’y a pas de place pour le mal.”

En l’écoutant, Nicolas Zepeda était aussi particulièrement ému, assis dans son boxe.

© Alexane Alfaro

"Et s’il était coupable ?"

Quand Me Portejoie, l’autre avocat de Nicolas Zepeda, questionne le père, il surprend, ose, à se demander qui est son client.

Le témoignage du père de l’accusé s’est achevé pour laisser la place à Ana-Luz Zepeda, la mère.

Le procès doit se poursuivre pendant environ trois semaines.

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