Sécheresse à Besançon : “De toute façon on n’aura pas le choix, tout le monde va devoir s’adapter !”

Depuis quelques années, saison chaude rime avec sécheresse sur le territoire bisontin. Des épisodes de plus en plus intenses qui altèrent sévèrement la biodiversité, les territoires et la qualité de vie de ses habitants. Geoffrey Darmencier, directeur du département Transition écologique de la Ville de Besançon, décrypte pour nous les symptômes, les enjeux et les solutions possibles pour faire face à ces bouleversements. Interview.

Les berges du Doubs, Chemin de Mazagran © Lilou B.

Quels sont les impacts environnementaux visibles de la sécheresse sur le territoire bisontin ?

Geoffrey Darmencier nous explique que "les effets sur le paysage urbain sont particulièrement visibles. La sécheresse se fait ressentir dans les milieux naturels, principalement les parcs et jardins, mais aussi au niveau du volume et du débit du Doubs". Et d’ajouter : "Ensuite, il y a les impacts moins visibles comme les pénuries dans les eaux souterraines et les nappes phréatiques."

Le Département du Doubs a été placé en situation d’alerte il y a deux jours (le 26 juin 2023, ndlr). A partir de quand décrète-t-on l’état de sécheresse ? Autrement dit, quels sont les critères et qu’est-ce que cela implique ?

Décréter l’alerte sécheresse relève de la compétence du préfet de département. Le directeur du Département Transition écologique souligne l’existence de "plusieurs niveaux d’alerte, en fonction de la disponibilité de la ressource en eau relevée dans différentes zones du département ; il y a donc une progressivité dans les mesures de restrictions. Aujourd’hui nous sommes au premier stade d’alerte." Concrètement cela signifie qu’il reste possible d’arroser jardins et pelouses entre 20h et 8h et que le nettoyage des voitures, des façades des maisons ainsi que le remplissage des piscines font l’objet de restrictions. Geoffrey Darmencier nous explique "lorsque le niveau de ressources en eau s’amenuise au point de menacer la disponibilité de l’eau potable, on passe au stade de "crise". C’était le cas l’été dernier. Il faut s’y préparer. "

Les restrictions d'usage de l'eau en fonction des différents stades d'alerte © Préfecture du Doubs

Besançon a déjà subi de plein fouet la sécheresse l’année dernière, comment expliquer cette récurrence ?

A cette question, Geoffrey Darmencier nous explique que "le climat d’un territoire se mesure selon deux critères : la température et le niveau de précipitations. Aujourd’hui à cause du réchauffement climatique la température augmente." Le régime de précipitations quant à lui se modifie : "les pluies sont plus intenses sur un temps plus court, avec des épisodes parfois très espacés. En l’occurrence il pleut de moins en moins sur les mois d’été. Dans cette situation, le sol s’assèche." Or, lorsque la pluie tombe sur une terre trop sèche, "elle ruisselle sans s’infiltrer en profondeur dans les sols, ce qui affecte les niveaux des eaux souterraines", précise Geoffrey Darmencier, "c’est un phénomène de plus en plus récurrent et les prospectives climatiques ne vont pas dans le bon sens : à mesure que les températures continuent d’augmenter, nous entrons dans un régime très chaud et très sec pérenne."

Comparaison climatologique annuelle des températures moyennes année 1980 / année 2022 à Besançon - Thise © Info.climat

Comparaison climatologique annuelle du niveau de précipitations année 1980 / année 2022 à Besançon - Thise © Info.climat

Que fait la ville de Besançon pour répondre à ce problème ?

La Ville a présenté en mai 2023 le Plan eau, qui établit une approche globale sur la question. "Premier objectif : réduire les prélèvements en eau de manière anticipée sur les futures restrictions, par exemple au niveau de l’entretien des espaces verts et voiries", annonce Geoffrey Darmencier avant de poursuivre : "Deuxième angle d’approche sur le plus long terme : réduire les impacts de la sécheresse en adaptant les politiques publiques, notamment en investissant dans la réduction des fuites sur les réseaux d’eau ou encore en réutilisant au maximum les eaux usées. Par exemple, des milliers de mètres cubes issus des eaux de vidange des eaux de la piscine Mallarmé pourraient être réutilisées".

Autre risque induit par la sécheresse : celui des incendies. Une nouvelle menace que "la Ville de Besançon prend très au sérieux étant donné la proximité des forêts par rapport à la ville", souligne Geoffrey Darmencier. Un travail en coordination avec l’ONF et les services de l’état pour la prévention et l’anticipation du risque d’incendies est en cours.

A l’échelle individuelle, quels sont les bons gestes à adopter ?

"Contre les températures extrêmes il y a tout d’abord des moyens simples de garder le frais chez soi à coût zéro : fermer les rideaux le jour, aérer la nuit", énonce Geoffrey Darmencier. "Concernant l’eau, il faut réduire les usages non essentiels, comme le jardinage de loisir, le remplissage des piscines individuelles ou le lavage des voitures", préconise-t-il.

Comment pensez-vous que ces mesures seront reçues par les Bisontins ?

"Ce qui pouvait sembler anecdotique il y a encore quelques années est aujourd’hui la norme. A mesure que les épisodes de sécheresse se répètent, le cadre réglementaire se durcit. Nous sommes assez confiants sur la capacité des habitants à intégrer les nouvelles règles du jeu. De toute façon on n’aura pas le choix, tout le monde va devoir s’adapter", conclut le directeur.

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