Pour prélever ces échantillons, les biologistes - qui vont y chercher des traces d'agents infectieux, de pesticides ou autres polluants chimiques - ont profité d'une vaste opération menée durant la dernière semaine du mois d'octobre pour nettoyer un grenier de la Saline où les petits mammifères volants élisent domicile chaque été, depuis au moins 25 ans.
Une couche d'excréments d'une vingtaine de centimètres
En analysant une couche d'excréments d'une vingtaine de centimètres d'épaisseur, les biologistes du laboratoire de "chrono-environnement" de l'Université de Besançon espèrent "remonter le temps" et "comprendre ce qui a pu conduire à la quasi-extinction de certaines espèces de chauves-souris", explique Renaud Scheifler, l'un des deux responsables scientifiques du projet.
Près d'une tonne de guano devenue gênante
Les gestionnaires de la Saline royale, lieu construit de 1775 à 1779 et classé au patrimoine mondial de l'Unesco, commençaient à trouver gênante cette accumulation de crottes dans des combles situés au-dessus de chambres d'hôtes. En l'absence des centaines de chauves-souris peuplant habituellement les lieux, parties en septembre hiberner dans des grottes ou des caves, la "vidange" a été menée par la Cpepesc, une association locale spécialisée dans la sauvegarde de ces animaux.
"Nous avons sorti exactement 984 kilos de guano", précise Florent Billard, l'un des chiroptérologues de l'association. Les déjections, constituées principalement de résidus d'insectes, vont être épandues dans les jardins de la Saline, ou dans ceux des bénévoles ayant participé à l'opération. Le nettoyage ne devrait pas empêcher les chauves-souris de revenir au printemps dans les combles de la Saline, où elles se reproduisent.
A la recherche des crottes datant de la catastrophe de Tchernobyl
L'analyse des "carottes" prélevées par les scientifiques va prendre plusieurs mois, voire plusieurs années. Outre des tests sur la présence éventuels de polluants, les chercheurs vont procéder à des analyses ADN pour déceler, au fil des années, d'éventuels problèmes de consanguinité au sein de la colonie, ou encore attester de la présence passée d'autres espèces de chiroptères aujourd'hui du site.
L'une des difficultés sera de dater précisément les échantillons. Pour cela, les chercheurs espèrent repérer dans l'accumulation de crottes un pic de Césium 137, issu de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl en 1986, ce qui leur donnerait un repère pour situer sur une échelle de temps l'ensemble de la "carotte".
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- Les responsables du projet voient déjà plus loin: ils espèrent obtenir les financements pour analyser le guano des chauves-souris dans une trentaine de grottes. L'épaisseur des crottes peut y être encore plus impressionnante que dans un grenier: jusqu'à 1,70 m, selon M. Billard.
(Avec AFP)