Une étude scientifique coordonnée à Besançon pour savoir comment le personnel et les résidents des EHPAD ont vécu la crise du Covid-19

Comment le personnel et les résidents des EHPAD ont-il vécu la crise du Covid-19 ? C’est l’objet d’une étude scientifique coordonnée à Besançon par la Plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie. Nous avons posé nos questions à Elodie Cretin, directrice de la Plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie et coordinatrice de l’étude COVIDEHPAD…

Photo ©Maxime C Logo ©Plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie ©

maCommune.info : Qu’est-ce que la Plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie ?

Elodie Cretin : "La Plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie est une structure nationale basée à Besançon dont l’objectif est de faire travailler en réseau des chercheurs de tous les domaines (aussi bien en santé que dans le secteur des sciences humaines et sociales) qui s’intéressent aux questions liées à la fin de vie, à la mort et aux soins palliatifs. Notre plateforme est portée par Université Bourgogne Franche-Comté et soutenue par le ministère des Solidarités et de la Santé, par le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation ainsi que par la Fondation de France. Nous coordonnons actuellement une étude nationale sur le vécu du confinement, la fin de vie et la mort dans les EHPAD pendant l’épidémie de Covid-19. Nous l’avons baptisée COVIDEHPAD."

mCi : Comment vous est venue l'idée de vous pencher sur le vécu de la crise du covid-19 par le personnel et les résidents des EHPAD ? Qu'est-ce qui vous intéressait particulièrement dans ce sujet ?

Elodie Cretin : "Il était évident pour nous que la recherche avait un rôle à jouer dans ce contexte de crise sanitaire. La situation dans les EHPAD était préoccupante. Dès le mois de mars, il nous a paru essentiel de recueillir des données pendant le pic épidémique directement auprès des personnes concernées. Il nous semblait en effet crucial d’obtenir des témoignages à chaud. C’est pourquoi nous avons lancé cette étude en urgence. Elle a pu débuter dès début avril grâce à l’implication d’une équipe de chercheurs de différentes disciplines qui s’est constituée pour l’occasion."

mCi : Combien de chercheuses et chercheurs ont participé à cette étude et d'où viennent-ils ?

Elodie Cretin : "Dix-huit chercheurs travaillent actuellement sur l’étude COVIDEHPAD (vous pouvez en consulter la liste sur cette page web : https://www.plateforme-recherche-findevie.fr/etude-covidehpad). Ce sont des anthropologues, des sociologues, des psychologues et des philosophes de sept laboratoires différents répartis sur le territoire français. Ils ont mené l’enquête dans des EHPAD de six régions de France : Auvergne Rhône-Alpes, Bourgogne Franche-Comté, Grand Est, Hauts de France, Ile-de-France et Bretagne. Un comité scientifique interdisciplinaire de treize personnes incluant plusieurs médecins pilote l’étude."

mCi : Et vous, Elodie Cretin, quel a été votre rôle ?

Elodie Cretin : "Pour ma part, en tant que directrice de la Plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie, je coordonne l’étude en collaboration avec nos deux co-présidents : Régis Aubry et Patrick Baudry. Je fais en sorte que ces chercheurs de spécialités différentes et de laboratoires différents puissent travailler ensemble (ce qui est d’ailleurs l’une des missions de la Plateforme, indépendamment de COVIDEHPAD). La mise en place de cette étude en période de confinement, tout le monde étant en télétravail, n’a pas été facile, mais nous y sommes parvenus. Nous nous réunissons chaque semaine en visioconférence pour faire le point et discuter des aspects scientifiques et méthodologiques."

mCi : Quel est l'objectif de COVIDEHPAD ?

Elodie Cretin : "L’objectif est de montrer comment les professionnels, les résidents des EHPAD et leurs proches font face à la crise et à ses conséquences. Nous voulons décrire et comprendre l’expérience et le vécu de ces personnes confrontées aux situations de confinement, de fins de vie et de décès dans ce contexte de pandémie."

mCi : Comment vous y êtes-vous pris pour cette étude ?

Elodie Cretin : "À ce jour, 189 entretiens ont été réalisés dans 35 EHPAD différents. La première phase de l’étude (celle du recueil des données), est en train de se terminer. Des entretiens vont se poursuivre dans certaines régions pendant l’été et l’analyse des résultats débutera en septembre. Ce sont les personnels des EHPAD qui ont été principalement interrogés, mais aussi, quand cela était possible, les personnes âgées et leurs proches."

mCi : D'emblée, on pourrait croire sans avoir participé à cette étude que les personnels, résidents et familles dans les EHPAD n'ont pas vécu cette crise de manière positive, loin de là… et dans les faits ? Quels sont les résultats de votre étude ?

Elodie Cretin : "Bien sûr, la situation dans les EHPAD a été dramatique : les résidents ont été confrontés à la maladie et à la mort dans une situation de confinement inédite. Pour le personnel et les proches, cela a été également particulièrement éprouvant. Mais concernant les résultats de l’étude, il faudra encore attendre quelques mois que la phase d’analyse des données soit achevée pour que nous puissions vous en dire plus."

mCi : Est-ce que COVIDEHPAD a vocation à sensibiliser l'État, les collectivités, les établissements pour que la suite de la crise se déroule mieux ? Proposer des idées de développement pour que la crise soit mieux vécue ?

Elodie Cretin : "Nous espérons effectivement que les résultats apporteront des éléments susceptibles d'influencer les politiques d’accompagnement du vieillissement et de solidarité envers les personnes vulnérables, en situation de crise mais pas seulement. Nous aimerions que nos conclusions puissent apporter des pistes d’amélioration de l’organisation des soins pour les personnes âgées qui vivent en institution."

mCi : Qui finance cette étude ?

Elodie Cretin : "L’étude COVIDEHPAD est financée par la Caisse nationale de la solidarité pour l'autonomie (CNSA), le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation (MESRI) et le CNRS. Le CHU de Besançon est le promoteur de cette recherche que nous coordonnons, à travers Université Bourgogne Franche-Comté."

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