Lecornu échappe de peu à la censure et va pouvoir s’atteler au budget

Sébastien Lecornu a échappé à quelques voix près jeudi 16 octobre 2025 à la censure, le Parti socialiste laissant sa chance au Premier ministre en échange de sa promesse de suspendre la réforme des retraites. Les débats budgétaires vont désormais pouvoir commencer à l'Assemblée dès la semaine prochaine.

© Alexane Alfaro

Au total, 271 députés ont voté pour, insuffisant pour atteindre les 289 voix nécessaires pour renverser le gouvernement. LFI, le groupe des communistes et ultra-marins, les écologistes et l'extrême droite ont approuvé à quelques exceptions près le texte de la France insoumise, Les Républicains et surtout le PS faisant le choix inverse. Une deuxième motion déposée par le Rassemblement national n'a elle réuni que 144 voix.

De manière au moins provisoire, le président de la République réussit son pari, après avoir renommé contre vents et marée Sébastien Lecornu, qui avait dû démissionner le 6 octobre, privé du soutien du patron de LR Bruno Retailleau, furieux de la composition du gouvernement Lecornu 1.

Le Premier ministre a sobrement pris acte de cette non-censure, se disant "au travail", satisfait que "les débats puissent démarrer".

A la tribune, le député socialiste Laurent Baumel a défendu la décision de son groupe: ce n'est "en aucun cas un pacte de non-censure" pour l'avenir, a-t-il averti.

"La pérennité même de votre gouvernement" est suspendue à l'effectivité de la suspension de la réforme des retraites promise, et "il n'y aura pas d'entourloupe ou de ruse procédurale", a-t-il prévenu, alors que des doutes émergent sur le fait que la suspension soit effectivement votée au terme de la discussion budgétaire.

Chacune leur tour, Aurélie Trouvé (LFI) puis la cheffe des députés RN, Marine Le Pen, ont tenté de convaincre les possibles hésitants, notamment chez LR et au PS, de voter leur motion respective.

La suspension de la réforme des retraites, "n'est qu'un leurre, une tromperie, un subterfuge", a dénoncé la députée insoumise.

Marine Le Pen a elle tancé la droite, qui après "après avoir fait campagne pendant des mois sur son refus de se dissoudre dans le macronisme", a préféré "se dissoudre dans le socialisme". Fustigeant un budget de "matraquage fiscal", elle a attaqué les "partis unis par la terreur" d'une élection anticipée et dit attendre la dissolution "avec une impatience croissante".

"Moment de vérité"

En réponse, Sébastien Lecornu, dont le gouvernement a été nommé dimanche, a appelé à "un moment de vérité entre ordre républicain et désordre", demandant aux censeurs de ne pas "prendre en otage" le budget.

Pour donner des gages aux députés, le Premier ministre a renoncé à utiliser l'arme du 49.3 dans les débats budgétaires, permettant habituellement au gouvernement d'imposer son texte.

De leurs côtés, Insoumis, écologistes et communistes ont fustigé des mesures d'économies "inacceptables" comme le gel des prestations sociales ou le doublement des franchises médicales.

Chez les socialistes, sept voix ont fait défaut, principalement parmi les députés ultra-marins. Dans un communiqué, certains avaient reproché mercredi au gouvernement "son désamour à l'égard des territoires d'outre-mer".

Les LR ont eux décidé très majoritairement de ne pas censurer "au nom de l'intérêt national de doter la France d'un budget" malgré des "désaccords importants" selon leur orateur Jean-Didier Berger. Ils se sont conformés à la ligne édicté par leur chef Laurent Wauquiez.

Une députée LR a cependant voté pour les motions LFI et RN, et deux de ses collègues pour la motion RN seule.

Bataille du budget

Les débats autour du budget, dont le texte a été présenté en Conseil des ministres mardi et qui prévoit un effort d'une trentaine de milliards d'euros, vont enfin commencer à l'Assemblée la semaine prochaine.

La commission des Finances s'emparera lundi du projet de loi de finances pour une arrivée prévu dans l'hémicycle vendredi. La bataille entre une gauche traversée de tensions, un socle commun fracturé et l'extrême droite s'annonce dantesque, dans des délais très contraints.

Le premier secrétaire du PS Olivier Faure a prédit que la gauche serait "unie" pour "corriger un budget très injuste" et "récessif" et arracher de nouvelles concessions au gouvernement. Mais la cheffe des députés LFI Mathilde Panot a elle appelé militants et électeurs socialistes à "rompre les rangs" avec la direction.

"On va se battre désormais pour protéger les Français, pied à pied, article par article, amendement par amendement" a quant à lui promis le RN Jean-Philippe Tanguy.

Même au sein du bloc central, le chef des députés Horizons Paul Christophe, contre la suspension de la réforme des retraites, a prévenu: "nous ne voterons pas n'importe quoi. Nous n'avons aucunement l'intention de renier nos valeurs".

(AFP)

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