Livres dans la Boucle : les réactions sur retour de R. Enthoven dans le programme

Publié le 09/09/2025 - 12:12
Mis à jour le 09/09/2025 - 14:28

La déprogramation annoncée le 4 septembre dernier de l’écrivain Enthoven avait fait couler beaucoup d’encre… Ce lundi 8 septembre 2025, la maire de Besançon a finalement déclaré le maintien du philosophe au sein de l’édition 10e édition. Réactions.

 © mCi
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"Les positions tenues par Raphaël Enthoven cet été m’ont amenée à proposer à Gilles Ory, vice- président Culture du Grand Besançon, de déprogrammer sa venue au festival Livres dans la Boucle, pour éviter que la sérénité de cet événement soit remise en cause avec des risques de troubles à l’ordre public. Aujourd’hui, le monde littéraire traduit cela comme de la censure, ce qui n’a jamais été mon intention et ne le sera jamais", a indiqué Anne Vignot par voie de presse ce lundi.

Aussi, elle a indiqué que "la sécurisation sera adaptée" face à sa venue.

Les réactions face à cette décision

Les libraires de l’Intranquille, du Grand Forum, de la Maison de livre et de la presse, des Sandales d’Empédocle et de Mine de Rien

"La décision des élus de l’agglomération de reprogrammer Raphael Enthoven suite à la décision de Anne Vignot d’annuler son invitation à Livres dans la boucle et de rétablir ainsi la liberté d’expression est un soulagement.

Si sur le fond, nous ne partageons pas les propos de Raphaël Enthoven sur les journalistes à Gaza, Livres dans la boucle est depuis toujours un festival ouvert au débat et aux idées.

Cette décision, prise sans concertation avec l’équipe organisatrice du festival à savoir sa responsable Christine Bresson à nos côtés depuis 10 ans, Bertrand Morisset de l’agence Tome 2 mandatée pour la programmation, et nous libraires (de l’Intranquille, du Grand Forum, de la Maison de livre et de la presse, des Sandales d’Empédocle et de Mine de Rien) directement impliqués dans l’organisation du festival, nous a plongé dans une situation des plus préoccupantes. Nous saluons l’intervention de David Foenkinos dont on sait qu’il a joué un rôle important dans ce retournement".

Communiqué de la section PCF de Besançon

"La section du Parti communiste français de Besançon regrette l’invitation de Raphaël Enthoven au festival littéraire Livres dans la boucle. Ses propos du 15 août 2025, affirmant qu’« il n’y a AUCUN journaliste à Gaza mais uniquement des tueurs ou des preneurs d’otages avec une carte de presse », sont d’une gravité extrême. Ils criminalisent sans nuance des femmes et des hommes dont le courage consiste à informer au péril de leur vie.

Est-ce une atteinte à la liberté d’expression ? Rappelons que la liberté d’expression en France n’est pas absolue. Ce qui est bien compréhensible. Il est par exemple interdit de nier l'existence de la Shoah, interdit de faire l'apologie du terrorisme. Il est aussi interdit de faire l'apologie de crime de guerre. Nous ne voulons pas nous placer sur le terrain juridique, mais politiquement les propos de Raphaël Enthoven présentent sous un jour favorable des actes qui à l’avenir seront probablement jugés comme des crimes de guerre.

Les propos de Mr Enthoven sont contraires à ceux des grandes organisations de presse et de nombreux journalistes, y compris israéliens. En février 2024, plus de 30 organisations de presse, dont l’Associated Press, l'Agence France-Presse et Reuters, signent une lettre ouverte en solidarité avec les journalistes de Gaza.  En août 2024, le Comité pour la protection des journalistes pointe  la « pratique récurrente d’Israël consistant à accuser des journalistes de terrorisme sans fournir de preuves crédibles » afin de justifier leur assassinat. Récemment, Reporter sans frontière lance une campagne: "Au rythme où les journalistes sont tués à Gaza par l’armée israélienne, il n’y aura bientôt plus personne pour vous informer". Le journaliste Edwy Plenel évoque aussi le massacre injustifié des journalistes.

Les propos de Mr Enthoven sont contraires aux déclarations de l'ONU. On trouve sur le site de l'ONU de nombreuses condamnations. Par exemple: " Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH) ont condamné lundi le meurtre de six journalistes palestiniens lors d'une frappe israélienne dans la ville de Gaza le 10 août". Qui faut-il écouter ? L’ONU ou Mr Enthoven ? L’enquête de la Cellule Investigation de Radio France a montré que de tels propos ne relèvent pas d’une réflexion autonome mais reprennent la propagande de l’armée israélienne. Il s’agit de la seule source de Mr Enthoven. Cette désinformation prépare et justifie la cible des journalistes palestiniens par des frappes.

Raphaël Enthoven n’est pas un dissident réduit au silence. Il occupe toutes les tribunes médiatiques et n’est en rien privé de liberté d’expression. Mais rien n’oblige la collectivité publique à financer sa venue et à lui offrir visibilité et caution. Cela ne relève pas de la censure, mais d’un choix politique assumé : celui de défendre les valeurs humanistes qui fondent notre engagement.

En conscience et par respect pour les journalistes assassinés, les communistes de Besançon affirment : non, Raphaël Enthoven n’est pas le bienvenu au festival Livres dans la boucle".

Laurent Croizier, député du Doubs et Conseiller municipal de Besançon

"La déprogrammation du philosophe et essayiste Raphaël Enthoven a déclenché une polémique d’ampleur nationale et a profondément choqué la communauté littéraire. Écarter un auteur d’un salon littéraire en raison de ses opinions relève de la censure. C’est une atteinte inacceptable au pluralisme et à la liberté d’expression. Depuis, les désistements d’auteurs se multiplient et le Président d’honneur, David Foenkinos menace de se retirer.

La décision politique d’Anne Vignot, prise sous la pression du parti communiste, l’a été en toute connaissance de cause. Elle a mis en danger l’existence même du salon littéraire, en portant atteinte à son intégrité, à sa réputation et à l’investissement humain et financier de Grand Besançon Métropole.

Il est désormais vital de sauver la crédibilité des « Livres dans la Boucle » et de tout faire pour que ce festival demeure un espace de liberté, un lieu de débat démocratique où aucune pression politique ne saurait s’exercer. Madame Vignot doit désormais assumer ses responsabilités. Pour rétablir la sérénité et l’honneur des « Livres dans la Boucle », Madame Vignot doit démissionner de la présidence institutionnelle du salon littéraire. Je demande que cette démission soit inscrite à l’ordre du jour du prochain bureau de Grand Besançon Métropole prévu ce jeudi."

Jean-Philippe Allenbach, président du Mouvement Franche-Comté

"Se retrouver contrainte par l’opinion et les médias de devoir renoncer à la censure de Raphaël Enthoven, peu de temps après l’avoir déjà été, par la justice, de devoir retirer le drapeau palestinien de la mairie, est bien évidemment une 2ème humiliation politique pour Mme la maire et dont les communistes de sa majorité sont les premiers responsables. En effet, ce sont eux qui sont à l’origine de ces deux initiatives malheureuses, tant pour Mme Vignot, notamment dans la mesure où elles risquent de lui coûter des voix, que pour l’image la ville.

Ce qui, soit dit en passant, démontre la force de leur emprise politique, notamment via leur leader local, Hasni Alem, sur Mme la maire. Alors que le Parti communiste, dont tout le monde sait que la défense de la liberté de parole n‘a jamais été le point fort, a fait seulement 2,28 % (Fabien Roussel) à la dernière présidentielle !

Dès lors, le M.F.C. qui prône l'alternance pour la prochaine municipale ne peut qu'espérer que le PC bisontin poussera  prochainement Mme Vignot à engager d'autres actions du même type..."

Ludovic Fagaut, président du Groupe Besançon Maintenant, avant l’annonce officielle de la maire

"L’affaire Enthoven révèle une nouvelle fois la gestion chaotique et idéologique de l’équipe municipale. Officiellement, Mme Vignot a invoqué un problème de sécurité pour justifier son annulation. Mais dans le même temps, elle choisissait aussi de boycotter la rentrée de la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises) à Arc-et-Senans, à laquelle l’auteur participa sans le moindre incident. La contradiction est flagrante : il ne s’agissait pas de sécurité, mais bien d’un choix politique dicté par une idéologie d’extrême gauche.

Sous la pression du Président d’honneur David Foenkinos mais aussi de différents auteurs et acteurs économiques du monde du livre, mais aussi sous la pression populaire et politique demandant le respect de la liberté d’expression légale, Mme Vignot a dû faire machine arrière. Un mail ayant fuité laisse désormais entendre que l’écrivain pourrait être reprogrammé, apportant ainsi la preuve que la raison et le bon sens auraient dû l’emporter dès le début. Cette polémique, inutile et néfaste, met en péril l’attractivité du salon, fragilise l’économie du livre et porte atteinte à l’image de Besançon. La culture et les grands événements doivent rassembler et dépasser les clivages idéologiques. Besançon ne mérite pas d’être abîmée par des décisions arbitraires et partisanes. Les Bisontins attendent une municipalité capable de défendre la liberté d’expression, de soutenir la culture et de promouvoir une image positive de notre ville. Il est temps que ce mandat se termine devant cette incapacité à faire preuve de discernement devant les prises de décisions. Stop à ces mascarades polémiques orchestrées par cette majorité. Besançon et Grand Besançon Métropole se doivent d’être au-dessus des considérations partisanes".

Communiqué de LFI

"Concernant la reprogrammation de R. Enthoven au festival Livres dans la Boucle, nous restons sur le contenu de notre communiqué publié la semaine dernière. Depuis des mois il tient des propos qui légitiment le génocide en cours à Gaza et la politique de colonisation israélienne. La liberté d’opinion n’autorise pas à déverser sa haine envers un peuple qui souffre.

C’est de notre humanité dont il s’agit et en pareil cas, tout devient politique. Face aux crimes qui se déroulent en direct à Gaza, notre humanité nous interdit de fermer les yeux. Elle nous commande d’agir à tous les niveaux pour dénoncer l’horreur des massacres. Pour que cela s’arrête. Et cela passe aussi par dénoncer les colporteurs de haine et relais de la propagande du gouvernement israélien, coupable de ce génocide.

Un événement quel qu’il soit doit être l’occasion de rappeler cela. Alors non M. Enthoven n’est pas le bienvenu à Besançon."

Communiqué de l'association France Palestine Solidarité

"Nous venons d'apprendre avec consternation et regret la décision de Madame la Maire de Besançon de revenir sur sa décision de déprogrammer Monsieur R. Enthoven du festival littéraire « Le livre dans la boucle ».

Après sa déprogrammation, Monsieur Enthoven et ses soutiens, ont hurlé à la censure, à la liberté d'expression bafouée, l'essayiste a ainsi interpellé la Maire de Besançon: « Avez-vous le sentiment d'avoir défendu la démocratie en empêchant un écrivain de venir parler de sa mère, sous le prétexte que vous ne partagez pas son opinion ? ». De quoi parle-t-on ? Le PCF de Besançon avait souligné le caractère inadmissible de propos tenus par M. Enthoven sur le réseau social X le 15 août: « Il n'y a AUCUN journaliste à Gaza. Uniquement des tueurs, des combattants ou des preneurs d'otages avec une carte de presse ». Comment doit-on entendre ces propos, lorsque Reporter Sans Frontières (RSF) alerte sur le fait que : « Ce n'est pas seulement une guerre contre Gaza, c'est une guerre contre le journalisme lui-même. Les journalistes sont tués, ils sont ciblés, ils sont diffamés. Sans eux, qui dira la famine, qui exposera les crimes de guerre, qui dénoncera les génocides ? Ajoutant encore que: « En 2024, la Palestine est devenue le pays le plus dangereux au monde pour les journalistes. Piégés dans l'enclave, les reporters de Gaza n'ont plus d'abris et manquent de tout, nourriture, eau... En Cisjordanie, les journalistes sont régulièrement harcelés et agressés par des colons et les forces israéliennes, tandis que l'impunité pour les crimes commis contre les journalistes est la règle. ». Alors, lorsqu'il s'exprime ainsi, de manière publique, M. Enthoven ne justifierait-t-il pas, ne cautionnerait-t-il pas l'assassinat des journalistes Gazaouis, par une armée dont la Cour Internationale de Justice (CIJ) a reconnu dès janvier 2024 comme « plausible » qu'elle puisse commettre un génocide contre la population palestinienne dans la Bande de Gaza ? S'agirait-il ainsi encore d'une « opinion » et du droit fondamental à la liberté d'expression lorsque l'enjeu est la vie d'êtres humains ou s'agit-il d'un appel à la haine ? Monsieur Enthoven qui s'indigne de la censure dont il serait l'objet et par là de la menace que cela représente pour la démocratie, qualifierait comment l'élimination de la presse palestinienne à Gaza et du droit d'informer sur ce qui se déroule à Gaza ? Comment qualifierait-il l'interdiction faite à la presse internationale de venir à Gaza couvrir la guerre en cours ?

La cellule d'investigation de Radio France, dans son enquête sur la « "Cellule de légitimation" : l'unité israélienne qui rattache les journalistes de Gaza au Hamas », démontre le rôle de propagande mortifère de cette unité secrète pour délégitimer et criminaliser les journalistes palestiniens, afin de les présenter comme des terroristes, qui deviennent De Facto des cibles « légitimes » https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts. Cette enquête de la cellule d'investigation de Radio France, rappelle que l'accusation qui consiste à prétendre que les journalistes palestiniens sont liés au Hamas est « Portée principalement par l'intellectuel Raphaël Enthoven, cette affirmation est réfutée par toutes les organisations de journalistes interrogées par la cellule investigation de Radio France dont lONG française Reporters sans Frontières ou le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) basé à New York. ». On peut donc s'interroger sur ce que cherche ainsi M. Enthoven.

En 2023, la Maire de Besançon avait pris un arrêté municipal pour interdire que Dieudonné ne se produise à Besançon, "afin de garantir le respect de l'ordre public". Le monde culturel, artistique, littéraire avait, fort heureusement, bien compris que l’on peut empêcher qu’une personne ne se produise en publique lorsque ses prises de positions et propos sont intolérables, et ne s’était pas indigné en affirmant qu’il se serait agi de censure et que cela est intolérable. En 2013, quand Dieudonné devait se produire à Besançon, pour les mêmes raisons que la Maire de Besançon, notre association avait déjà produit un communiqué, repris un peu partout en France, « Non, Dieudonné n’est pas le bienvenu à Besançon ! ».

Aujourd’hui, quand une caution morale comme RSF dénonce l’assassinat de masse des journalistes palestiniens et toutes les autres exactions dont ils sont victimes, quand un organe de l’ONU comme la CIJ se saisie de l’instruction des actions armées d’Israël dans la Bande de Gaza, jugeant qu’il y a un risque « plausible » de génocide, nous affirmons au regard des propos indécents de M. Enthoven : Non, Enthoven n’est pas le bienvenu à Besançon !"

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