Néonazis déambulant dans les rues de Besançon : "Que font la police et la Ville ?"

Publié le 31/08/2022 - 15:28
Mis à jour le 01/09/2022 - 16:41

Dans la nuit de samedi 27 à dimanche 28 août 2022, un groupe de militants d’extrême droite a été facilement repéré au centre-ville de Besançon notamment par des chants hitlériens audibles et des saluts nazis visibles, rapporte un article de Kawa le 29 août. Nous avons contacté une source policière ainsi que la maire de Besançon pour tenter de répondre à deux questions qui se posent sur les réseaux sociaux : "Que fait la police ?" et "Que fait la maire ?".

Photographie des « Vandal Besak », dans la fontaine de l’État-Major place Jean Cornet à Besançon. © capture d’écran
Photographie des « Vandal Besak », dans la fontaine de l’État-Major place Jean Cornet à Besançon. © capture d’écran "Telegram"

Le rédacteur de l’article, Toufik de Planoise, rapporte qu’un groupe d’une vingtaine de militants d’extrême droite a déambulé dans le centre-ville de Besançon après avoir consommé dans un bar de la place Jean Gigoux dans le quartier Rivotte pour fêter l’anniversaire de l’un d’entre eux. 

Au programme de cette manifestation sauvage : chants militaires allemands, saluts hitlériens, stickers SS, banderoles, fumigènes et cagoule.

Pour immortaliser ce moment, le groupe s’est fait prendre en photo sur la fontaine de l'état-major sur la place Jean Cornet (qui était résistant français) : un homme cagoulé, fumigène à la main, entouré de 17 autres individus dont deux d’entre eux présentent un drapeau VDL BSK (Vandal Besak), formation connue pour véhiculer des idées néonazies.

Aucun appel à la police enregistré

Malgré la consternation des habitants, comme le précise l’article de Kawa, personne n’aurait appelé la police. Notre source policière, qui n'avait pas connaissance des faits avant notre appel, nous explique que "la nuit de samedi à dimanche était une nuit de folie ! Les collègues qui travaillaient cette nuit-là ont été appelés toutes les 5 à 10 minutes jusqu’à 5 heures du matin pour toutes sortes d’interventions".

Vols à la roulotte, tapages, agression sexuelle, violences conjugales, incendies de poubelle, alcoolémies au volant, ivresses sur la voie publique, rixes sur la voie publique, différends conjugaux, infractions routières, etc. En retraçant toutes les interventions de cette nuit-là, notre source confirme : "nous n’avons reçu aucun appel dans le secteur pour ce type de tapage."

Et la vidéo surveillance ?

Fumigène, groupement de personnes au centre-ville… Ce type d’évènement devrait être visible sur les écrans du centre de supervision urbaine ? "Oui, c’est visible, mais quand il y a des incendies de poubelle en pied d’immeuble, on va plutôt sur ce genre de fait", nous explique-t-on.

"Je rappelle que les collègues mobilisés cette nuit-là n’ont pas arrêté, il y avait beaucoup de procédures et peu de voitures". Et d’ajouter : "On ne peut pas être partout, on ne peut pas se démultiplier, on fait ce qu’on peut alors qu’on n’a pas les moyens pour gérer tout ce qu’il se passe", nous confie notre interlocuteur.

Qu’aurait fait la police si elle avait été prévenue ?

Il affirme que seulement "trois voitures de police étaient en circulation dans la nuit de samedi à dimanche » pour gérer une nuit très mouvementée. « Si on avait reçu un appel, je ne voudrais pas parler à la place de mes collègues, mais je pense pouvoir vous dire qu’ils seraient venus, que le groupe d’individus aurait arrêté immédiatement ce qu’ils faisaient et disaient. Sur la photo, on voit 18 personnes : la voiture de police et ses trois effectifs auraient demandé du renfort, un contrôle des identités aurait été effectué avec prise de photo."

Notre interlocuteur conclut : "De toute façon, on sait qui ils sont, ils sont connus des services, ce n’est pas parce qu’ils ne sont pas interpellés cette nuit-là qu’il ne se passe rien de notre côté."

Et la Ville de Besançon dans tout ça ?

Nous sommes parvenus à obtenir un entretien avec la maire de Besançon Anne Vignot ce mercredi 31 août en fin de matinée qui nous a indiqué avoir été prévenue rapidement après les faits. "Très vite, on s’est dit que l’urgence était de ne pas laisser se réaliser ce genre de comportement dans l’espace public et nous avons pris acte de ces dérives pour qu’avec la police, on puisse intervenir sur ces personnes qui ne respectent pas les valeurs républicaines. "

Anne Vignot ajoute qu’"on sait que dans le secteur, depuis très longtemps, il y a des groupuscules qui mènent des actions, on sait qu’ils ont des rituels, on sait qu’ils viennent régulièrement au centre-ville, et on constate que depuis quelques mois, ils sortent d’une forme d’anonymat, s’exposent de plus en plus, expriment à travers notamment des tags leur idéologie contre laquelle on a lutté, on doit lutter et on luttera toujours, on ne les laissera pas faire. "

"On a besoin de plus de forces de police sur notre territoire"

Actuellement, les agents de la police municipale ne travaillent pas la nuit (sauf exception le 14 juillet, fête de la musique…). Leur service se termine entre 22 et 23 heures en fin de semaine. Anne Vignot nous informe d’une part, qu’un travail est en cours sur l’amplitude d’activité des policiers municipaux. 

D’autre part, tout comme notre source policière précédemment citée, Madame la maire fustige le manque de moyens de la police. "Nous avons une convention avec la police nationale, on est d’accord sur la répartition des rôles, sur la méthode de travail et je souligne que les types d’action sur les groupuscules nécessitent une coordination. Aujourd’hui, on peut effectivement se rencontrer à nouveau pour reparler des actions spécifiques face à ce type de comportement, mais de toute façon, on a besoin de plus de forces de police sur notre territoire. Samedi soir, on avait seulement trois voitures sur 117.000 habitants ; quand vous savez que tout le monde les attend sur les rodéos, les braquages ou tout autre fait important, sur 6.000 hectares, on leur demande d’être partout et les fonctionnaires se retrouvent en manque d’effectifs lorsqu’ils vivent une nuit comme celle de samedi à dimanche." 

"Il n’est pas question qu’il y ait une forme de normalisation de l’atteinte à nos valeurs républicaines." - Anne Vignot

Depuis son élection il y a 2 ans, à chaque dégradation avec des croix nazies sur la voie publique, les murs, sur des monuments, Anne Vignot a porté plainte. "À chaque fois, on les a signalés parce qu’ils s’autorisent de plus en plus une expression publique. Il n’est pas question qu’il y ait une forme de normalisation de l’atteinte à nos valeurs républicaines, nous avons besoin que toutes les forces, polices nationale et municipale, gendarmerie, soient sur la même ligne, un tel comportement nécessite une action, une intervention forte, pour amener ces individus devant la justice. Ça ne demande aucune faiblesse face à de tels actes."

"Téléphonez à la police !"

Comme nous l’indiquions précédemment, aucun appel à la police n’a été enregistré dans la nuit de samedi à dimanche. Pour Anne Vignot, "face à la demande pour des rodéos, des trafics de stupéfiants, etc. on voit bien que la police est très active, et je la salue pour son travail remarquable, mais qu’ils n’arrivent pas être dans la réactivité imaginée, voulue par les citoyens, et donc le geste d’appeler la police ne se fait plus". La maire appelle la population à téléphoner à la police ou la gendarmerie "parce qu’on a besoin de signalements au plus tôt, ne croyez pas que nous ne sommes pas là pour entendre ou voir, ça nous permet de mobiliser notre centre de supervision urbaine, de mettre des caméras aux bons endroits et donc qualifier les actes qu’ils commettent, ce qui est important pour la justice."

Infos +

Moins violent, mais surprenant, "Vandal Besak" revendiquerait sur sa chaîne Telegramm le vol d’un cochonnet en pleine partie de pétanque de retraités le 25 août dernier à Bouclans. Une information qui avait été relayée dans la presse locale. Deux hommes cagoulés avaient alors fait irruption et avaient volé le cochonnet avant de prendre la fuite en courant.

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