Arrêté "anti mendicité" à Besançon : les premiers concernés en parlent

Publié le 20/08/2018 - 15:51
Mis à jour le 22/08/2018 - 12:19

Ils s’appellent Morgan, Emmanuel ou Jonathan. Ils restent pendant plusieurs heures assis dans les rues de Besançon, attendant que quelqu’un veuille bien déposer une pièce dans le petit chapeau devant eux. Que pensent-ils de la polémique faisant suite à l’arrêté pris le 9 juillet 2018 ?

mendicité Besançon 

 ©
mendicité Besançon
©

L'arrêté municipal en vigueur du 9 juillet au 30 septembre 2018 puis du 23 novembre au 31 décembre interdit la "mendicité accompagnée ou non d'animaux", mais aussi "la consommation d'alcool, les regroupements et la station assise ou allongée" entravant la circulation publique.

Des pratiques interdites entre 10h et 20h dans le centre-ville de Besançon. En cas d'infraction, des amendes de 38 euros peuvent tomber. Un texte qui a provoqué un tollé sur les réseaux sociaux. Samedi, une manifestation contre l'arrêté a mobilisé environ 200 personnes.

Les SDF de Besançon se sentent-ils hors la loi ? C'est la question que nous leur avons posée.

Morgan, 23 ans, Emmanuel, 46 ans et Jonathan, 25 ans vivent dans la rue depuis plusieurs années déjà. Le premier a traversé la France avec sa femme et fait escale à Besançon, ils souhaitent rejoindre Montpellier. Le second, découragé, est sans domicile fixe depuis cinq ans après avoir tenté de se réinsérer. Le troisième cherche à n’importe quel prix à retrouver sa fille de quatre ans. Ils sont tous les trois au courant du nouvel arrêté et en éprouvent un sentiment amer.

On a déjà besoin de dix balles pour manger par jour…

"Faire la manche, c’est une agression pour les gens qui se promènent tranquillement : les pères de famille, les mères de famille. Mais nous, on ne nous aide pas, on nous laisse dans le trou" estime Emmanuel aux côtés de son acolyte en s’ouvrant une des bières posées à côté d’eux. Subjugué, il s'interroge quant au manque de solidarité des pouvoirs publics. Il s’interroge plutôt sur la politique de réinsertion et d’accompagnement, "en panne" pour le moment selon lui.  "Je ne trouve pas ça normal. On a déjà besoin de dix balles pour manger par jour, ils vont nous forcer à faire 45 balles par jour"

Morgan est moins complaisant et condamne ceux qui consomment de l’alcool dans la rue, mais aussi ceux qui généralisent les mendiants. "Qu’ils interdisent de boire dans la ville, ceux qui font la manche avec leur bière, je veux bien… mais on n’est pas tous pareil. » Il a le sentiment d’être condamné à la place des réseaux organisés de mendicité et ressent un profond sentiment d’injustice et de rancune envers ces réseaux.  

 Jonathan arbore l'article sur l’arrêté antimendicité. Pour lui ce dernier ne vise pas les bonnes personnes. "Je vais mettre 5h pour avoir 10€ et acheter de quoi manger pour mes chiens et moi… Pendant ce temps, il y en a qui sont en train de faire la manche debout et qui viennent se vanter devant moi qu’ils ont fait 80€ à la journée…". Il se tait et fixe son regard sur l’accordéoniste en train de jouer place Pasteur perché sur un bloc de pierre.

"Rien ne sert de cacher la misère"

Emmanuel voit cet arrêté comme un moyen pour "nettoyer l’image de la ville". Il ne veut pas se sentir comme un déchet, mais comme "un humain, un citoyen français" et considère que rien ne sert « de cacher la misère. Il faut aider les gens à s’en sortir" lance-t-il.

Jonathan voit quant à lui, à travers cet arrêté, un moyen de freiner la mendicité croissante de la ville. "Il y a de plus en plus de jeunes qui font la manche pour la drogue et qui font des overdoses à cause de ça…"

Un arrêté efficace ?

Pour Morgan c’est clair. Cet arrêté ne l’empêchera pas de mendier. "En attendant j’ai besoin de bouffer, si j’ai pas à manger j’ai rien quoi… On a tous besoin de vivre. Je n'’ai rien : pas le RSA, pas d’aide, si je ne fais pas la manche j’ai rien pour vivre."

Emmanuel n’est pas convaincu. Même s’il se résigne à arrêter de fréquenter le centre-ville, il se sent rejeté par les élus qui ont pris cet arrêté.

Pendant ce temps, Jonathan prépare son réquisitoire pour le jour où des policiers viendront le verbaliser. "Je n’arrive même pas à me faire 38€ par jour". Emmanuel s’arrête et semble perdu et marque un temps long avant de se demander : « qu’est-ce qu’on peut faire ? On ne peut rien faire… »

Pourtant Jonathan et Morgan retrouvent le sourire chacun leur tour. Morgan montre fièrement, mais discrètement les invendus d’une valeur de 50€ qu’un commerçant de la rue vient de lui apporter. Un fourgon de police passe. Il ne s’arrête pas. Morgan se dit finalement confiant. Jonathan, alors qu’il était encore dans ses pensées noires, relève la tête et aperçoit deux de ses amies qui viennent le saluer.

Soyez le premier à commenter...

Laisser un commentaire

arrêté anti-mendicité Besançon

Conseil municipal : les élus LR fustigent la majorité “atomisée” de Jean-Louis Fousseret

Le conseil municipal de Besançon post-polémique autour de l’arrêté anti-mendicité s’annonce houleux ce jeudi 20 septembre 2018. Entre la création d’un intergroupe au sein de la majorité plurielle du maire LREM de Besançon, l’opposition a tenu à s’exprimer. Dans un message posté sur Facebook, le conseiller municipal LR Ludovic Fagaut parle d’une majorité atomisée et émet le souhait de faire avancer certains dossiers…

Election municipale 2020, arrêté polémique, majorité fissurée… : qu’en pense le maire de Besançon ?

VIDEO • L’été 2018 a été tumultueux pour le maire à Besançon : entre polémique autour de l’arrêté dit « anti-mendicité », la création d’un intergroupe au sein de la majorité du conseil municipal ou encore les positionnements pour sa succession, comment voit-il la suite de son mandat jusqu’à l’élection municipale en 2020 ?

Municipales à Besançon : Dahoui appelle au rassemblement de la gauche

A moins de deux ans des élections municipales et suite à la fissure de la majorité plurielle renforcée par la polémique de l’arrêté anti-mendicité du maire LREM de Besançon, l’adjoint au maire (PS) en charge de l’éducation appelle dans une tribune au rassemblement de « toute la gauche bisontine ». Pour lui, il est impérieux que la majorité municipale tienne bon. Encore faut-il que les différentes composantes de la gauche à Besançon puissent se parler.

Société

Dans le Doubs, 7.000 chevreuils bientôt abattus ?

Le préfet du Doubs, par arrêté annuel, conformément aux dispositions prévues par l’article L425-8 du code de l’environnement, a fixé le nombre minimal et le nombre maximal de chevreuils à "prélever" par territoire en prenant compte des "dégâts causés par cette espèce", selon une information du 24 avril 2024. Ainsi, 7.000 chevreuils ”maximum” pourront être tués dans le département pour la saison 2024-2025. Le public peut donner son avis sur cet arrêté.

Publicités vandalisées à Besançon : les militants écologistes en soutien à l’un des leurs

Les militants écologiques des collectifs Alternatiba, ANV-Cop 21 et Extinction Rébellion ont tenu ce vendredi 3 mai une conférence de presse sur l’esplanade des Droits de l’Homme à Besançon en amont d’une convocation de l’un d’eux par le tribunal judiciaire suite à une plainte de l’entreprise JC Decaux. 

Cimetière Saint-Claude à Besançon : le nouveau carré musulman boueux, une famille en colère ne peut pas se recueillir…

Depuis 4 mois, une famille déplore les conditions dans lesquelles leur maman est enterrée, dans le nouveau carré confessionnel musulman du cimetière Saint-Claude à Besançon. Gadoue, flaques d’eau… l’accès aux tombes est difficile et accidenté pour les personnes qui souhaitent venir s’y recueillir.

10.000 élèves à la découverte des parcs éoliens en Bourgogne – Franche-Comté

Le 21 mai et jusqu’au 5 juin 2024, l’association France Renouvelables lance son évènement "Génération Transition". Pour la deuxième année consécutive, quelque 10.000 élèves, collégiens et lycéens de France pourront découvrir les coulisses de l’énergie éolienne notamment en Bourgogne – Franche-Comté.

Attaques contre les droits trans et reproductifs : une manifestation le 5 mai à Besançon

Nouvel esprit, association LGBTQIA+ née en 2007 à Besançon, a signé la tribune publiée mardi 30 avril 2024 dans Politis suite à l’initiative de plus de 800 autres organisations et collectifs de s’unir pour faire face ensemble aux attaques contre les droits trans et reproductifs. Une manifestation est prévue le 5 mai à Besançon.

“Résurrection” le nouveau jardin du musée de la résistance de Besançon rend hommage aux déportés

À l’occasion de la Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation, le Musée de la Résistance et de la Déportation de Besançon a inauguré dimanche 28 avril 2024 à 14h son nouveau jardin baptisé "Résurrection" en hommage à tous les déportés de la Seconde Guerre mondiale. 

Offre d'emploi

Devenez membre de macommune.info

Publiez gratuitement vos actualités et événements

Offre d'emploi

Sondage

 8.84
légère pluie
le 06/05 à 21h00
Vent
0.94 m/s
Pression
1014 hPa
Humidité
90 %