Procès de Frédéric Péchier : deux seringues pour "armes du crime"

Publié le 09/09/2025 - 13:01
Mis à jour le 09/09/2025 - 15:46

Le procès de Frédéric Péchier, anesthésiste bisontin accusé de 30 empoisonnements, dont 12 mortels, s’est poursuivi ce mardi matin au palais de justice de Besançon. Cette deuxième audience a consacrée à l’enquête préliminaire ouverte en 2017, présentée par le directeur d’enquête Olivier Verguet, de la police judiciaire.

Frédéric Péchier © Alexane Alfaro
Frédéric Péchier © Alexane Alfaro

Le 11 janvier 2017, Mme Simard, 36 ans, subit une intervention "sans risque" à la clinique Saint-Vincent. Elle fait un arrêt cardiaque inattendu. "Au bout d’une heure, arrêt cardiaque incompris, sans rythme cardiaque, le personnel est dans l’incompréhension", a relaté le commissaire Verguet.

Une poche de soluté est saisie : elle contenait "100 fois la dose de potassium", alors qu’aucun ajout médicamenteux n’était attendu. "Le chlorure de potassium est utilisé pour des peines de mort dans certains pays", a rappelé l’enquêteur.

Frédéric Péchier intervient alors et administre du gluconate de calcium, un antidote contre les effets du potassium, un médicament n’est pas utilisé sans diagnostic apprend-on.

Un second cas, neuf jours plus tard

Le 20 janvier 2017, M. Gandon, 70 ans, connaît à son tour un arrêt cardiaque en salle d’opération. Dr Péchier est l’anesthésiste en charge. L’enquête révèle que des poches de paracétamol utilisées ce jour-là contenaient des anesthésiques locaux, dont de la lidocaïne, "stupéfiants" pour les enquêteurs : "La lidocaïne ne doit pas être utilisée en intraveineuse", assure Olivier Verguet.

Des rapprochements avec d’autres affaires

Très vite, les policiers identifient d’autres cas suspects grâce à la mémoire d’un chef de service, collègue de Verguet lors d’une réunion d’état-major qui a lui aussi vécu ce type d’affaire : il s’agissait de trois arrêts cardiaques en 2009 à la Polyclinique de Franche-Comté.

Un cas de 2008 interpelle particulièrement, celui de Damien Iehlen pour une opération du rein à la Polyclinique de FC : il décède avec "cinq fois la dose létale de lidocaïne" alors que Péchier assistait à la réanimation, annonçant l’arrêt cardiaque "avant même que les alarmes ne retentissent".

Une enquête dans un milieu fermé

Le commissaire Verguet a insisté sur les difficultés rencontrées lors de l’enquête : "une scène de crime particulière, en milieu médical, où nous n’avons pas l’habitude d’intervenir. Les armes du crime, ce sont les médicaments."

Dans ce dossier, les enquêteurs ont également retenu l’image de deux seringues retrouvées sur des scènes distinctes, ce sont les "armes du crime" assure Verguet. Ces objets banals dans un bloc opératoire deviennent, dans le cadre de l’enquête, les équivalents d’un couteau ou d’une arme à feu dans un crime de droit commun.

Le secret médical et le devoir de confraternité ont également freiné les investigations. "Au début, on nous disait : non, il ne se passe rien. Puis, au fil du temps, certains médecins ont pris conscience qu’il pouvait y avoir un criminel parmi eux."

Mesures d’urgence et "psychose" à la clinique

Après les cas de janvier 2017, la clinique Saint-Vincent signale immédiatement les faits à l’ARS et organise des réunions de crise. "La situation était particulièrement anxiogène et le risque de réitération était important", a expliqué Olivier Verguet.

Le 8 février 2017, les enquêteurs décrivent une "psychose" naissante dans les blocs opératoires. Des mesures de vigilance accrues sont mises en place, les stocks de solutés remplacés.

Les écoutes téléphoniques

Dès février 2017, 25 lignes téléphoniques sont mises sur écoute. Elles révèlent des tensions au sein du personnel et des échanges ambigus autour du Dr Péchier.
Dans une conversation interceptée le 10 février, l’anesthésiste se dit "victime d’un acte malveillant" au sujet du cas Gandon. Mais après sa garde à vue du 4 mars, son discours change : "Son raisonnement du début n’était plus du tout le même après la garde à vue", a relevé l’enquêteur, "il disait que ces arrêts cardiaques étaient la conséquence de l’incompétence de ses collègues et d’erreurs", se souvient Olivier Verguet.

Autre conversation qui interpellera les enquêteurs, celle entre l’épouse et la soeur de Frédéric Préchier dans laquelle elles semblaient toutes les deux "pessimistes" selon Verguet, et parlaient d’une tentative de suicide du médecin.

Une poche de soluté et du matériel de perfusion dans la voiture

Le 4 mars 2017, Péchier est placé en garde à vue pour la première fois. Sept dossiers le visent alors. Des perquisitions sont menées : dans sa voiture, les policiers découvrent une poche de soluté et du matériel de perfusion, ce qui étonne même les collègues de Péchier. Dans son casier professionnel, une ampoule de sufentanil et une boîte de néfopam sont retrouvées.

Selon Olivier Verguet, "la situation était suffisamment suspecte pour envisager une mise en examen".

Témoignages et fractures dans le milieu médical

Les auditions des confrères de Péchier ne disent pas grand choses, puis les langues se délient au fur et à mesure de l’enquête montrant des divisions. Certains médecins parlent de "conflits entre anesthésistes", d’autres envisagent pour la première fois une "hypothèse criminelle".

Un médecin auditionné à plusieurs reprises aurait lancé au commissaire : "J’ai passé plus de temps avec vous que si j’étais en garde à vue."

L'audience reprendra à 13h30.

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