"Je me suis endormie le 11 janvier (2017) au matin et je me suis réveillée le 16, intubée, attachée et perdue", a raconté avec douceur Sandra Simard, qui était venue à la clinique Saint-Vincent de Besançon pour une simple opération du dos.
A son réveil, une infirmière lui explique que son "coeur s'est arrêté pendant l'intervention" et qu'elle a "dormi pendant cinq jours”. Les jours suivants sont "très traumatisants", "personne ne peut donner d'explication à mon arrêt cardiaque", se souvient la comptable, âgée de 36 ans à l’époque.
Ses trois enfants viennent la voir à l'hôpital. "Dans mon délire paranoïaque, je leur ai dit au revoir comme si je ne les reverrais jamais. Ca a été la chose la plus difficile que j'aie eue à vivre", ajoute Sandra Simard, dans le silence de la salle d’audience.
"Malgré les années, je n'ai rien oublié de ces moments"
Finalement, un enquêteur annonce l’impensable : "un produit toxique est passé dans mes veines. Pour la première fois depuis mon réveil, je savais que je n'avais pas de problème cardiaque”.
Frédéric Péchier, qui n'était pas chargé de son anesthésie mais qui a participé à sa réanimation, sera interpellé début mars 2017. "Malgré les années, je n'ai rien oublié de ces moments : les hallucinations, la paranoïa, la peur, un sternum fracturé par un massage cardiaque...", cette femme discrète aux longs cheveux auburn.
Désormais, "je vis comme dans le corps d'une vieille personne", poursuit la victime, qui a été en arrêt maladie pendant deux ans et demi. Elle garde des "séquelles neurologiques", "d'importants problèmes de mémoire, de fatigue, d'intolérance au bruit”.
"Toute ma vie a été remise en cause, toutes mes habitudes. Malgré tout, je n'estime pas avoir le droit de me plaindre, parce que je suis en vie, contrairement à beaucoup d'autres personnes”.
Sandra Simard dit ressentir un "mépris" de l'accusé pour les victimes. Et "le mépris blesse autant que la seringue qui vous empoisonne”.
Frédéric Péchier, 53 ans, est jugé pour 30 empoisonnements de patients, dont 12 sont morts, entre 2008 et 2017 dans deux cliniques privées de Besançon. L'accusé clame son innocence. Il comparaît libre, mais risque la réclusion criminelle à perpétuité.
Le verdict est attendu le 19 décembre.