Tribunal de commerce : "Cette année, je suis un président malheureux, inquiet et en colère"

Publié le 25/01/2024 - 17:43
Mis à jour le 25/01/2024 - 17:46

Jeudi 25 janvier 2024, Pierre-André Dubreuil, président du tribunal de commerce, a effectué un bilan de l’année 2023 mais a également exprimé son mécontentement suite à un article du code de commerce, obligeant deux juges à quitter leurs fonctions… Lors de cette audience solennelle de rentrée judiciaire du tribunal de commerce, deux nouveaux juges ont donc été installés.

"L’année dernière, j’avais terminé mon allocution en précisant que j’étais un président heureux, entouré d’une équipe efficace, volontaire et particulièrement motivée. Cette année, je suis un président malheureux, inquiet et en colère", a lancé devant l’assemblée Pierre-André Dubreuil, président du tribunal de commerce.

La cause ? Un article du code commerce. "L’article L723-7 dispose dans son premier alinéa que les juges des tribunaux de commerce ayant effectué cinq mandats dans un même tribunal de commerce ne sont plus éligibles dans ce tribunal", explique le président qui s’insurge : "Cette mesure est terriblement fâcheuse. Nous perdons, avec Pierre Berthet et Manuel Isely, deux piliers de l’institution. Ils ont été tous les deux vice-présidents, présidents de la chambre du contentieux et ont assuré la présidence de nombreuses audiences et ont rédigés des centaines de jugements. Nous perdons d’un seul coup, 36 années d’expérience", précise Pierre-André Dubreuil qui a interrogé le collège de déontologie qui a répondu : "la limitation de cinq mandats au sein d’un tribunal, si elle peut faire débat, ne soulève en elle-même aucune problématique d’ordre déontologique"…

Le président précise toutefois "ne pas baisser les bras" et avoir depuis plusieurs mois "formés de nouveaux présidents d’audience".

Deux nouveaux juges

L’audience solennelle a également été l’occasion d’installer deux nouveaux juges :

De gauche à droite : Arnaud Lavergne et François Grobost © Hélène Loget

À 56 ans, François Grobost a obtenu en 2005 un master en contrôle de gestion et stratégie d’entreprise. Il est certifié dans le domaine des diagnostiques immobiliers (il a créé son propre cabinet) et diplômé de l’institut d’expertise judiciaire à Paris depuis 2010.

À 52 ans, Arnaud Lavergne a décroché en 1995 un diplôme d’ingénieur en art et métier. Il a d’abord travaillé au sein d’Alstom (chef de projet et responsable de chantier). Depuis 2002, il est directeur d’usine et co-gérant de la société AgroDoubs et directeur général de PEB (Coquy)

Un guichet unique qui ne passe pas vraiment…

Instaurée par la loi PACTE, le guichet unique implique que les entreprises devant réaliser des démarches le fassent via un site unique. Ce dispositif est obligatoire depuis le 1er janvier 2023.

"Ce guichet unique aurait dû être pleinement opérationnel au 1er janvier 2023. Cette échéance n’a pas été respectée et de graves dysfonctionnements perdurent", dénonce le président en indiquant qu’il serait "peut-être opportun de revenir au fonctionnement antérieur" (infogreffe) qui "fonctionnait parfaitement".

Au total, 1.152 jugements ont été rendus en 2023 contre 926 en 2022. La hausse s’explique suite au nombre d’ouverture de procédures collectives.

La loi du 20 novembre 2023...

Cette loi d’orientation et de programmation du ministère de la Justice s’axe sur trois principales mesures que le président à souhaiter évoquer.

La transplantation (à titre expérimental) de quelques tribunaux de commerce en tribunaux des affaires économiques.

"Ces tribunaux verront leurs compétences élargies (…) cela a pour but de soulager les tribunaux judiciaires et de les transférer sur les tribunaux de commerce qui présentent le grand avantage de la gratuité", fait remarquer Pierre-André Dubreuil.

Une deuxième mesure n’a pas été retenue dans la loi : "elle consistait à mettre à disposition des tribunaux de commerce un magistrat professionnel issu des tribunaux judiciaires. Cette proposition a immédiatement suscité une levée de bouclier de la part de l’ensemble des juges consulaires. Ils y ont vu une mise en cause de leur indépendance. Je suis plus mesuré, j’estime que nous n’avons pas assez de contact avec les magistrats de la cour et ceux du tribunal judiciaire et que des échanges plus fréquents ne pourraient être que bénéfiques".

La mise à disposition d’attaché de justice et d’assistants spécialisés pour les différentes juridictions. "Les tribunaux de commerce ne sont malheureusement pas concernés", regrette le président.

Enfin, la troisième mesure implique une contribution pour la justice économique : "Nous nous sommes d’abord réjouis, pensant que pour partie, elle aurait pu contribuer au financement des tribunaux de commerce, mais aucune annonce n’a été faite dans ce sens…", souligne Pierre-André Dubreuil qui indique que la juridiction reçoit une dotation annuelle de l’Etat de 1.000 euros.

Un président, bientôt contraint de démissionner…

En novembre dernier, Pierre-André Dubreuil a nommé un nouveau vice-président, Jean-Gilles Marcaud. Ce dernier lui succèdera l’an prochain au poste de président. La raison en est toujours le même article du code de commerce, mais dans son deuxième alinéa. "Le législateur a, en effet, estimé qu’à mon âge, on n’avait plus les capacités pour exercer la fonction de juge consulaire. Je n’ai pas vraiment l’impression d’être atteint de sénilité, mais je suppose qu’on applique le principe de précaution", ironise le président.

+ 80 % de procédures collectives en 2023…

En 2023, le tribunal de commerce a connu une hausse de 80 % des procédures collectives (NDLR : entreprise en difficulté placée sous contrôle judiciaire). Au total, 287 procédures ont été ouvertes en 2023 contre 160 en 2022 et 224 en 2019. Avec une hausse de 80 %, le tribunal de commerce de Besançon est ici, au-dessus de la moyenne nationale qui s’élève à 32%.

Les secteurs les plus touchés sont ceux du commerce, de la construction, de l’hébergement et de la restauration.

"Les entreprises ont dû faire face, après une crise sanitaire sans précédent, à des difficultés d’approvisionnement, déchausses de prix des matières premières, des problèmes de recrutement, une crise de l’énergie", précise Pierre-André Dubreuil.

Au 31 décembre 2023, 34.892 entreprises sont inscrites au registre du commerce et des société de Besançon.

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